Pourquoi "combattre l’extrême-droite" n’est pas du tout une priorité en 2024.
19 Mai 2025 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Qu'est-ce que la "gauche", #GQ, #Positions, #Syndicalisme en débat, #L'Europe impérialiste et capitaliste, #Front politique intérieur
Combattre l’extrême-droite n’est vraiment pas une priorité dans le monde et en France en 2025.
D’abord qu’est-ce qu’on entend par ce grand mot de « combattre », y a-t-il des SA dans les rues qui font régner la terreur comme à Berlin en 1930, des chemises noires comme en Italie en 1920 ? A part en Ukraine, dans le camp du régime de Kiev, on n’a pas vu ça en Europe depuis bien longtemps.
Dans la réalité quand on s’exprime ainsi on profère une métaphore grandiloquente pour manifester son horreur du Grand Satan incarné par l'extrême-droite et jurer qu’on va mette en quarantaine tous ceux qui ne font pas immédiatement la même chose quand on leur demande. Mais même ce combat verbal restera symbolique et se tiendra dans l’entre-soi confortable où tout le monde est d’accord et on se gardera bien d’arpenter les cités, les banlieues pavillonnaires et les régions rurales pour tenter de convaincre les masses. On sait trop bien comment on serait reçu. Non par des coups de gourdin et l’huile de ricin comme avant-guerre, mais avec des ricanements et des haussements d’épaule.
Il existe de graves menaces contre les libertés publiques, la droit d'expression et la paix mais elles ne proviennent pas de ce coté là. Elles proviennent du coté des partisans de l'UE et de l'OTAN.
Et puis il y a trois raisons pour lesquelles un tel « combat » est non seulement inutile mais carrément contreproductif.
1 ) Utiliser ses fenêtres de tir dans les médias pour attaquer l’extrême-droite - qui n’est pas au pouvoir en France pour le moment - signifie implicitement que Macron, les libéraux, les oligarques qui gouvernent à travers eux - et outre-Atlantique, les démocrates américains, sont un moindre mal, et tous les efforts politiques exercés dans ce sens aboutiront à les consolider. Comme l’extrême-droite est présentée dans les médias comme une opposition à cet ordre politique répugnant, la plupart des gens en concluront qu'en l'attaquant, en fait, on défend le pouvoir en place. Combattre l’extrême-droite ça s'est résumé en 2017 et en 2022 à pousser le grand cri Votez Macron ! au deuxième tour (et pour ceux qui avaient réussi à se faire peur à eux même, dès le premier), et à conclure un accord de désistement réciproque avec son parti en 2024 !
2) Dans les classes populaires, un grand nombre voire la majorité partage une partie des idées qui sont présentes dans les discours de l'extrême-droite, et qui pour discutables qu'elles soient ne sont pas des idées racistes ou suprématistes en elles-mêmes : rejet de l’assistanat, de la délinquance, de l’immigration, ainsi que de la culture et des mœurs post-modernes, et si on veut se faire l'interprète de ces classes et défendre leur intérêt matériel – ce qui serait quand même un minimum ! - il vaudrait mieux ne pas les contrarier systématiquement quand ce n’est pas carrément les insulter en voulant leur faire honte pour leurs opinions, d'ailleurs sans jamais vouloir les discuter d'égal à égal. Des opinions qui sont systématiquement interprétées de manière hyperbolique et paranoïaque – suivant une logique qui est justement dénoncée quand elle conduit à amalgamer antisionisme et antisémitisme. Par exemple, si on veut rendre effective l’expulsion des déboutés du droit d’asile, on sera assimilé aux collabos qui chargeaient les wagons à Drancy de déportés dirigés vers Auschwitz.
3) L’extrême-droite de maintenant n’est pas celle de 1930 (et la gauche non plus d’ailleurs), il s’agit essentiellement d'un mouvement de domaine symbolique et d’un épouvantail électoral, et les fascistes dignes de ce nom, les seuls vénérablement nocifs, extrémistes, dangereux, sont allés combattre les Russes en Ukraine sous les applaudissements des bien-pensants. Ni Trump au cours de son premier mandat, ni Melloni en Italie n'ont rien changé fondamentalement, ni aucun des partis parvenus au pouvoir après avoir été stigmatisés comme le retour de la peste brune n’a mené de politique sensiblement différente de celle de cet « establishment » et de ces élites qu’ils prétendaient combattre quand ils étaient dans l’opposition. C’est un tigre de papier, un fantasme qui se développe en roue libre entre militants qui ont perdu le contact avec la réalité, dans le monde parallèle des réseaux sociaux.
Donald Trump aujourd'hui, au delà de son nationalisme économique et de ses effets d'annonce contradictoires et incohérents favorise la diffusion mondiale d'un certain nombre de thèmes idéologiques conservateurs, et une variante néofasciste assumée du sionisme, mais c'est la réaction hystérique qu'il provoque qui fait l'essentiel du travail de communication. Et ses velléités de paix en Ukraine et de désarmement des agences du "soft power" impérialiste - à vrai dire assez peu crédibles à long terme, sont la principale raison de sa diabolisation et de la campagne médiatique mondiale contre son administration, à laquelle les suspects habituels "antifas" participent une nouvelle fois sans se poser de question. Seuls ceux qui sont sincèrement engagés du coté de la cause palestinienne commencent - à peine - à s'en poser.
Combattre l’extrême droite aujourd'hui c’est une fois de plus une manière simple de montrer qu’on ne combat pas le capitalisme, mais à sa place un fantôme destiné à effrayer les enfants. Et la classe ouvrière le voit bien.
GQ, 27 janvier 2024, relu le 20 mars 2025
Réveil Communiste :
Réveil Communiste est animé depuis 2010 par Gilles Questiaux (GQ), né en 1958 à Neuilly sur Seine, professeur d'histoire de l'enseignement secondaire en Seine Saint-Denis de 1990 à 2020, membre du PCF et du SNES. Les opinions exprimées dans le blog n'engagent pas ces deux organisations.
Le blog reproduit des documents pertinents, cela ne signifie pas forcément une approbation de leur contenu.
Le blog est communiste, non-repenti, et orthodoxe (comme ils disent). Il défend l'honneur du mouvement ouvrier et communiste issu de la Révolution d'Octobre, historiquement lié à l'URSS quand elle était gouvernée par Lénine et par Staline, mais sans fétichisme ni sectarisme. Sa ligne politique est de travailler à la création et à l'unité du parti du prolétariat moderne, et de lutter contre l'impérialisme (contre le seul qui importe, l'impérialisme occidental, dirigé par les États-Unis).
Les textes originaux, écrits par l'animateur seul ou en collaboration et dont il endosse pleine et entière responsabilité sont publiés dans la catégorie GQ, accessible directement dans la barre de menu. Ils sont reproductibles, sans modification, à condition d'en mentionner l'origine.
Les commentaires sont publiés après validation, mais ne sont pas censurés, sauf abus (insultes, diffamation, mythomanie, publicité, non-pertinence, ou bêtise manifeste).
Newsletter
Abonnez-vous pour être averti des nouveaux articles publiés.
Catégories
- 7041 Impérialisme
- 4809 Ce que dit la presse
- 4386 Economie
- 3233 lutte contre l'impérialisme
- 3153 Répression
- 2885 Journal des luttes
- 2861 Front historique
- 2709 États-Unis
- 2378 Qu'est-ce que la "gauche"
- 2296 A gerber !
- 2254 Ukraine
- 2128 l'Europe impérialiste et capitaliste
- 2085 classe ouvrière
- 2045 Cuba
- 2008 Russie
- 1880 Positions
- 1841 Syndicalisme en débat
- 1756 Initatives et rendez-vous
- 1737 Théorie immédiate
- 1654 Chine
- 1569 L'Internationale
- 1311 Élections
- 1213 Réseaux communistes
- 1128 Venezuela
- 1101 loi travail
- 1020 Amérique latine
- 1018 L'Europe impérialiste et capitaliste
- 934 Asie
- 870 Afrique
- 863 Europe de l'Est
- 857 élection 17
- 843 la bonne nouvelle du jour
- 668 Publications
- 612 Royaume-Uni
- 591 Art et culture révolutionnaires
- 575 Congrès du PCF depuis 2008
- 565 Syrie
- 528 Asie occidentale
- 521 Articles les plus lus archivés chaque semaine
- 490 GQ
- 466 Corée
- 435 Colombie
- 430 Euroboycott
- 372 Grèce
- 350 Luttes 2008-2011
- 339 Brésil
- 337 Communistes en Italie
- 304 La bonne nouvelle du jour
- 299 Bolivie
- 290 Mille raisons de regretter l'URSS