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Réveil Communiste

Révolution aux États-Unis ?

3 Juillet 2025 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #lutte contre l'impérialisme, #Front politique intérieur, #classe ouvrière, #Répression, #GQ, #États-Unis, #Qu'est-ce que la "gauche"

Révolution symbolique ?

Révolution symbolique ?

The revolution will not be televised ! (Gil Scott-Heron)

Que penser des troubles sociaux majeurs soulevés aux États-Unis par la politique répressive de Trump ? Dont les partisans semblent persuadés qu’en donnant un coup d’arrêt à l’ultra-libéralisme en matière de migrations, ils sont en train de lutter contre le socialisme ?

Émeutes populaires à Los Angeles, répression exercée contre les migrants par l’agence fédérale ICE (Douanes et Immigration) avec des soldats lourdement armés, projets apparemment délirants en réponse de sécession de la Californie, envoi de troupes fédérales, et manifestations de masse contre Trump dans tout le pays.

Cirque ou histoire véritable ? Ou si c’était le cirque qui était devenu l’histoire véritable ?

Des manifs de quelques centaines de militants déterminés qui affrontent les forces anti-émeute, qui bloquent une route, qui produisent de la fumée, qui se filment, et des feux de voiture et des images d'arrestation qui font le tour de la terre. Déjà les Gilets Jaunes sont tombés dans ce piège de l’image.

Quel rôle joue la classe ouvrière là dedans ?

Les migrants sont des ouvriers pour la plupart, l’action des agents de l’agence anti-migrants est une action de répression anti-ouvrière, qui les pourchasse jusque dans les champs et dans les ateliers. Mais c’est aussi une action contre les entreprises qui emploient cette main d’œuvre.

La très forte implantation de migrants sans-papiers dans le prolétariat le plus exploité des États-Unis pose un problème en soi, et les militants qui défendent la classe ouvrière ne doivent pas défendre en même temps l’immigration même qui est un moyen de surexploitation des ouvriers, et le retour au statu quo ante de l’administration précédente, qui ne l’oublions pas avait ouvert les portes toutes grandes à des millions de sans papiers.

Légaliser tout le monde et fermer la porte ensuite serait la solution théoriquement idéale, mais en fait cette porte ne peut plus être fermée car les États modernes ont détruit leur structure bureaucratique de contrôle frontalier. Le seul moyen efficace de lutter contre l’immigration devient le spectacle de la répression arbitraire et cruelle qui touche des gens ordinaires choisis par hasard et qui provoque la panique – pendant un certain temps.

Mais le terrain de l’émotion relayée par Tik Tok n’est pas favorable à la lutte ; les militants qui défendent la classe ouvrière doivent se rendre compte qu’une lutte dont le moyen principal et même exclusif est la production et la diffusion d’images spectaculaires poursuit une stratégie erronée et va servir de rampe de lancement à des faux héros, comme le gouverneur démocrate de Californie qui se verrait bien président en 2028.

La substitution du spectacle au réel d’ailleurs est très compréhensible parce qu’elle atténue la cruauté de la lutte – filmer un manifestant maltraité en direct est aussi efficace que d’en tuer mille sans les filmer, en le cachant - mais au prix de la portée de leur action dans le monde réel.

En 1970 la lutte contre la guerre du Viet Nam a affronté une répression bien plus forte et bien plus létale – mais qui au lieu de parader, avait honte et qui parce qu’elle avait honte, a perdu.

Ceux qui défendent le capitalisme le font au nom de la démocratie et il leur faut préserver cette fiction y compris vis à vis d’eux mêmes.

Mais sans doute sommes-nous entrés dans l’époque du capitalisme idiot qui confond l’impôt sur le revenu avec le socialisme (des deux cotés d’ailleurs, "AOC", la représentante démocrate « socialiste » de l'État de New York ne pense pas autrement). Un capitalisme idiot qui en ce moment scie la branche sur laquelle il est assis depuis un demi-siècle: l'afflux ininterrompu de main d'œuvre et de matière grise aux États-Unis

La défense de l’État de droit doit-elle être utilitaire ou menée par principe ? Et bien, je pense qu'il ne faut pas se mobiliser principalement autour de sa défense, sinon le fonctionnement régulier du système se remet en place automatiquement et la gauche américaine se précipite vers un débouché électoral - tel Bill Clinton après le premier Georges Bush.

Il y aura forcément des élections, et il est très possible que amateurisme et l’incompétence de Trump et de ses amis soit lourdement sanctionnée ; mais le vrai objectif politique devrait être la construction du parti des travailleurs américains, au-delà des clivages idéologiques artificiels.

Si par extraordinaire il n’y avait pas d’élection, on entrerait dans processus de déstructuration avancée des États-Unis, car le contrôle politique de ce pays repose sur un tissu dense de cadres politiques, d’élus locaux  et de responsables (juges, procureurs, agents de probation, gérants de fondations, membres des conseils de surveillance des écoles, universitaires, représentants et sénateurs des cinquante États) qui sont riches à l’échelle locale mais qui ne sont pas des milliardaires, et qui tiennent le pays sur le terrain.

Si leur espace politique disparaît, l’ordre social qu’ils font tourner depuis deux siècles touche à sa fin.

GQ, 16 juin - 3 juillet 2025

PS Trump a trahi sa base populaire  "MAGA" (make América great again) en rase campagne en s'engageant aux cotés d'Israël dans la guerre contre l'Iran. Cela pourrait créer les conditions d 'une recomposition générale. Les influenceurs de la gauche américaine n'en reviennent pas de tomber d'accord avec le journaliste réactionnaire pacifiste influent Tucker Carlson. Mais il ne faut pas oublier que si la base populaire (et non idéologique) du trumpisme est viscéralement opposée aux guerres éternelles provoquées par Washington, elle ne l'est pas moins à l'immigration, et les campagnes qui consistent à tourner en ridicule les fermiers du Nebraska qui se plaignent d'avoir perdu leur main d'œuvre du jour au lendemain parce qu'ils ont voté pour Trump ne servent à rien, à part à se faire rire entre convaincus - et à faire croire en l'efficacité de sa politique de harcèlement des travailleurs clandestins.

Quant au candidat "socialiste" et antisioniste à la mairie de New York, il est plus significatif par les torrents de haine qu'il suscite après sa victoire aux primaires démocrates - et les mesures arbitraires proposées contre lui, que par son socialisme qui ne mange pas de pain.

 

 

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P
Dans les tenants du système américains, j'ai l'impression que tu as oublié de citer toutes les organisations de la police et de l'armée, viscéralement anti-ouvrières et anti-communistes et tous les cadres des églises et autres sectes qui n'ont pas encore réussi.<br /> Evidemment, les alternances électorales ne changent pas le mode de domination des riches ni la poursuite de l'exploitation de ceux d'n-bas pour maintenait les profits de ceux d'en-haut.<br /> C'est du cirque et là les américains sont au "top"!
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D
On oublie généralement de montrer que les manifestants sont largement mexicains d'origine, qu'ils agitent le drapeau mexicain et qu'ils vivent en grande partie sur des territoires conquis par les USA sur le Mexique. Le processus migratoire en cours aboutit objectivement et à terme à poser la question du retour de ces territoires au Mexique car les manifestants se sentent chez eux et non pas comme des immigrés sur une terre étrangère. Habiter des lieux qui s'appellent Los Angeles, El Paso, Santa Fe, etc ou pour les Amérindiens des villages dénommés "pueblos" ne donne pas l'impression de vivre en Nouvelle-Angleterre.
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J
Effectivement, et d'ailleurs, lorsque j'avais voyagé jadis au Mexique ( en 1988), c'était dans les esprits, tous les Mexicains le savent.<br /> Ce qui m' avait frappé dans ce pays était la prégnance de l'histoire : il y avait des pueblos Cristeros toujours ennemis de la réforme agraire ( et à l'époque, c'était l'affiliation au PRI qui octroyait les privilèges)...La population manifestait ouvertement son anti-américanisme et par contre les Français étaient appréciés - ce qui m'étonnait eu égard à la tentative impérialiste de Napoléon III avec Maximilien II. Les Ninos Heroes, face aux envahisseurs yankees avaient leur station de métro, leur place et semblaient actuels. On voyait des slogans zapatistes sur les murs, à partir de Oaxaca, en allant vers le Yucatan.<br /> Clairement, les Mexicains ont un patriotisme fort, sont conscients de posséder une culture ancestrale de tout premier ordre. Aller aux USA ne signifie pas renoncer à cette identité, qui est aussi une identité de classe. <br /> Je me rappelle que j'y avais fait la connaissance d'un camarade pakistanais et qu'on visitait les pueblos autour de Mexico, pour rencontrer les gens, les simples gens des communautés rurales, souvent très démunis. Ils nous parlaient beaucoup ( le souci est qu'on n'avait pas appris l'espagnol !). Au prime abord, ils étaient réservés, suspicieux, nous prenant pour des Américains, peut-être des évangélistes. On leur disait d'emblée que nous étions communistes, et ça ouvrait toutes les portes : on nous offrait à boire (de l'agua electropurificada), on nous invitait à rester, et ces gens ne possédaient rien, ou quelques volailles. Et nous parlions politique. c'était exactement le contraire de ce qui ce serait passé en Occident, où s'affirmer communiste vous ferme souvent la porte.