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Réveil Communiste

Histoire de la répression en France : la nuit de la mort de Malik Oussékine, du 5 au 6 décembre 1986 au Quartier Latin

5 Décembre 2019 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Front historique, #Répression, #GQ, #Qu'est-ce que la "gauche"

Malik Oussékine, tué par la police le 5 décembre 1986 vers minuit

Malik Oussékine, tué par la police le 5 décembre 1986 vers minuit

texte de 2019

Peu de gens savent que le meurtre brutal de Malik Oussékine par la police eut lieu dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986 au moment même où un regroupement spontané de plusieurs centaines de manifestants d'origines politiques et sociales disparates forçait la porte de la Sorbonne et formait un comité d'occupation qui lançait un appel à la généralisation du mouvement de grève et d'occupation "à toute la population".

Ce "comité invisible" avant la lettre n'avait pas de dirigeant ni de porte-parole. Une équipe de télévision au moins se trouvait sur place mais le message de l'appel, dument enregistré ne fut jamais diffusé. Le mouvement de débordement des institutions qui s'esquissait sur une base théorique confuse, influencée par les partisans de la lutte armée, les mouvements des autonomes et par les situationnistes et leurs disciples plus ou moins orthodoxes fut douché et complètement éteint par l'indignation morale qui submergea tout, à la nouvelle de l'assassinat de Malik par les voltigeurs motocyclistes. Il s'ensuivit (le 10) de gigantesques marches blanches encadrées d'universitaires de gauche affublés de "casques blancs", modèle de ceux que Mélenchon voulut remettre en scène en janvier 2019, et qui se satisfirent du renvoi du ministre Devaquet.

Le meurtre de Malik joua un double rôle : intimider directement les manifestants et en isoler la frange activiste la plus déterminée, avec l'aide du syndicat étudiant lambertiste UNEF ID, pépinière de cadres du PS.

Les jours de décembre 1986 suivaient huit mois d'un gouvernement au pouvoir de la droite revancharde, dont le discours de base était bien plus raciste que l'actuel RN, et dont les héros étaient Reagan et Thatcher. L'année avait été marquée d'un grand nombre de bavures policières, y compris des assassinats de sang froid, comme celui de Loïc Lefèbvre perpétré par le CRS Gilles Burgos, qui étaient ouvertement assumées par la hiérarchie, et par une vague d'attentats liée aux intrigues du gouvernement français au Moyen Orient. La leçon reste à retenir.

Le mouvement étudiant fut relayé au mois de janvier par un mouvement puissant des services publics (SNCF, RATP, Poste, etc) sur des mots d'ordres propres, mais qui furent ressentis comme la réplique de décembre, et qui a sans doute enrayé provisoirement les privatisations prévues pour aligner la France sur le modèle anglo-saxon, mais pas plus.

Enfin, au printemps 87, Pasqua et Pandreau (le tandem répressif du ministère de l'Intérieur) refermaient la nasse sur Action Directe, mettant fin à l'utopie d'une action armée coupée des masses.

Décembre 86 fut une défaite de la conscience politique.

Les nuits de décembre 86 pleines d'erreur et d'errance laissent pourtant un sentiment de mystère non résolu. Une brèche s'est ouverte un court instant, mais personne ne s'y est engagé.

Pourquoi?

Parce qu'un mouvement social complètement spontané peut paraître sur la scène publique en profitant des contradictions interne du pouvoir et de la bourgeoisie. Ainsi Macron a-t-il été lâché par les soutiens médiatiques qui lui avaient offert la présidence sur un plateau l'année précédente, et cette défection peut être datée du moment où le journal "le Monde", qui ne fait rien par hasard, a décidé de  déballer l'affaire Benalla. Les déboires du président incompétent actuel font penser à ceux de De Gaulle, qui fit face au mouvement composite de mai 1968, au moment où il était lâché par la branche atlantiste, européïste et pro-américaine de la bourgeoisie.

Mais un tel mouvement ne peut pas passer à la phase suivante et triompher sans objectif commun, et cet objectif porte un nom, même si tout a été fait pour le couvrir de discrédit : le socialisme, qui est l'alternative unique au capitalisme triomphant, et qui est d'ailleurs apparu en même temps que lui, vers 1848. Et c'est la conscience de cette objectif qui peut faire émerger le parti révolutionnaire nouveau que la situation demande.

En 1986, au moment de la crise des pays socialistes, le socialisme paraissait sans avenir, aujourd'hui, c'est le capitalisme qui n'en a plus. Ce qui explique sa frénésie mondiale, répressive, interventionniste et belliciste.

GQ, 5 décembre 2016, complété le 30 janvier 2019

 

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G
Un texte qui va un peu dans tous les sens et qui oublie l'essentiel : La recréation des "voltigeurs" de Pasqua (Pandraud) en les appelant BRAV-M. Des policiers "braves" (? !) qui matraquent les gens tranquilles pour créer de la violence et se barrent aussi vite qu'ils sont arrivés.<br /> Difficile d'avoir un très haut degré de conscience politique et en même temps une immense foule.<br /> Il y a eu ici des foules immenses et la dissolution des voltigeurs, il a fallu 35 ans aux serviteurs de l'oligarchie pour reconstitués cette bande. Aux nouveaux arrivants de reprendre le flambeau, or on n'a pas réussi jusque là. Il ne faut pas accusé ceux de 1986 qui l'ont fait, mais plutôt ceux de 2021 qui n'ont rien fait !
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G
Ces jours ont vu aussi l'échec puis l'effondrement du situationnisme comme mouvement actif.
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