Nous, les communistes, que voulons-nous?
Quel est notre but ?
Une société égalitaire et libre (libre parce qu’elle est égalitaire).
Une société qui garantisse le droit au travail et à la satisfaction des besoins de base.
Une société de travailleurs égaux volontairement indifférente et aveugle à toutes les différences de genre, d’origine, de couleur de peau, de comportement sexuel, et de religion.
Nous voulons encadrer les revenus, fixer un revenu maximum (mesure encore plus indispensable que la fixation du salaire minimum, qui dépend du niveau objectif de la production de richesse).
Nous voulons une économie et une science ainsi qu’un progrès technologique développés dans l’intérêt du peuple tout entier, en commençant par les travailleurs, et non dans le but de faire des profits et de développer les armements, la guerre, la consommation ostentatoire et la production de déchets.
Nous voulons proposer ce but et convaincre les masses de la possibilité d’une telle société, possibilité qui tend à être recouverte d’écrans et de falsifications que la bourgeoisie aimerait rendre définitives. La bourgeoisie utilise sa conception de la démocratie comme écran. On entend dire les braves gens qui attendent devant l’isoloir : « nous avons la chance de pouvoir voter ! » Voter pour choisir la politique anti-sociale que l’on va subir devrait être plus important que de faire en sorte de ne pas subir de politique antisociale.
Nous voulons agir concrètement dans le cadre même de la société capitaliste pour améliorer la vie des travailleurs, dont nous faisons partie, essentiellement en augmentant les salaires nets, bruts, et totaux (salaires charges patronales comprises), en transférant les prélèvements fiscaux sur les plus riches, et en baissant les impôts indirects.
Nous voulons, pour aller dans cette direction, développer résolument les services publics (santé, éducation, transports, culture, logement social) et tendre à les rendre gratuits. La gratuité des services public ne peut pas se passer d’une politique d’éducation des usagers et du public en général pour faire régresser les incivilités, l’insécurité physique, le vandalisme, et l’incurie qui minent la qualité des prestations gratuites dans une société marchande, sans une lutte idéologique contre l'idéologie dominante : l'individualisme de masse.
Nous ne nous illusionnons pas sur l’acceptation d’une telle politique par les capitalistes et la bourgeoisie, mais nous croyons qu’une politique de réformes sociales égalitaires et radicales recevrait un puissant soutien populaire, aiguiserait les contradictions du capitalisme, et nous conduirait à la nécessité de la transition vers le socialisme.
Nous voulons retirer à chaque fois que l'occasion se présente à la bourgeoisie et aux capitalistes les leviers de commande politiques et financiers, et leur contrôle des médias et de la culture. On ne pourra plus tolérer à l’avenir la distillation de leurs mensonges, leur œuvre de déstabilisation et de mise en condition de l'opinion, et attendre passivement un coup de force à la chilienne, ou la guerre mondiale en préparation contre la Chine !
Il existe actuellement différentes voies socialistes expérimentées dans différents pays, adaptées à leur histoire nationale et à leurs traditions culturelles, la voie cubaine, la voie chinoise … pour qui connaît Cuba, il est évident que sans le blocus des États-Unis, la voie cubaine aurait le même succès économique que la voie chinoise. Et c’est bien pour ça qu’il y a un blocus, sinon l’expérience deviendrait invincible, et serait étendue à toute l’Amérique latine, au Moyen Orient et à L’Afrique.
Proposer cette nouvelle société plus juste, égalitaire et démocratique – parce que l’argent n’y jouerait plus aucun rôle politique – c’est le programme électoral minimum d’une gauche populaire. Les masses populaires de tous les pays adhèrent d’ailleurs très largement à de tels buts, pour peu qu’ils puissent être exposés librement, et qu’ils ne soient pas éclipsés par des controverses artificielles et irrationnelles portant sur les croyances religieuses et sur les mœurs.
Mais si tel est le cas, dirait l’avocat du diable, comment expliquer alors la faiblesse du mouvement ouvrier réel dans les entreprises, dans la rue, et dans les urnes?
En fait il est moins faible qu’il le croit, mais il n’en est pas conscient car il est sous l'emprise d'une puissante intimidation culturelle. Ou pour le dire autrement, il veut la fin, mais il n’en veut plus, ou pas encore à nouveau, les moyens. On voudrait le socialisme si on avait le choix, mais on ne veut pas la révolution socialiste que le grand récit anticommuniste a présenté dès le collège aux adolescents du monde entier comme un cataclysme et un crime contre l’humanité.
Le désir d’une société plus juste est universel, mais la volonté d’une révolution de la structure économique et sociale fait défaut. Il est compréhensible qu’on n’ait pas le désir du tumulte, des dangers, et du chaos transitionnel d’un état social à l’autre, mais cela n’empêche pas de désirer, ou de rêver, à une nouvelle société. Or ce rêve paraît de plus en plus chimérique et hors d’atteinte à la suite de deux ou trois générations de propagande capitaliste de fond, et de l’endoctrinement médiatique, culturel et scolaire des masses mondiales !
Dans ces conditions, la course à la consommation individuelle a remplacé l’espoir d’une société organisée pour le bien-être du plus grand nombre. Le clinquant de la marchandise et son miroir aux alouettes ont envahi les esprits comme un virus, mais le réel fait nécessairement toujours retour, aux moments les plus inattendus, avec les crises, les guerres, et les pandémies. Lorsque cela se produit il ne faut pas hésiter à saisir l’occasion par les cheveux, sans se préoccuper de pureté idéologique, de précaution de langage ou de formalisme juridique, et en étant prêts à une large alliance populaire sans exclusive ni préjugé.
Les grandes révolutions populaires du passé ne se sont jamais déclenchées pour l’application d’un programme parfait et utopique, mais en réaction à des abus monstrueux des classes dominantes qui obligèrent les masses à sortir de leur retranchements : déclaration de guerre d’agression au nom des « droits de l’homme » (déjà!), trahison des élites, et invasion de la France en 1792 et en 1871, guerre impérialiste perdue et participation catastrophique à la Grande Guerre impérialiste en Russie en 1905 et en 1917, coup d’État génocidaire en Espagne en 1936, invasion et démembrement colonial en Chine, de 1843 à 1949, dictatures criminelles en Amérique latine, oppression coloniale, etc. etc. Le rôle du parti révolutionnaire (au double sens historique et politique du mot « parti ») est de préparer les esprits à ce sursaut quand il devient inévitable et irréversible.
Mais il ne peut pas le préparer s’il n’est pas présent quotidiennement aux cotés des travailleurs et sensible à leurs difficultés concrètes, s’il ne se présente pas inlassablement tous les jours dans la lutte, et s’il ne propose pas « les jours heureux » , mais de manière crédible et non simplement incantatoire, avec une proposition de rassemblement populaire, à chaque élection.
Et il ne le peut pas non plus s’il ne s’engage pas clairement dans le camp anti-impérialiste, qui est le camp de la paix, car les puissances capitalistes occidentales mènent déjà la guerre contre la Russie et la Chine, pour le moment par procuration, en espérant stupidement obtenir grâce à leur cinquième colonne dans ces pays une reddition en rase campagne et sans combat, qui ne se produira pas. La guerre d'Ukraine provoquée par l'expansionnisme de l'OTAN et la guerre économique totale déclarée contre la Russie nous rapprochent dangereusement d'une guerre nucléaire.
Cette guerre mondiale qui aura lieu si nous ne faisons pas tout ce qui est en notre pouvoir pour nous y opposer, et d'ailleurs qu’elle ait lieu finalement ou non, créera la situation révolutionnaire objective, et le parti révolutionnaire historique, nécessité par cette situation, qui conduiront à la fin du capitalisme au niveau mondial.
GQ 21 juin 2021, revu le 8 septembre 2024