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Réveil Communiste

Comment choisir de bons dirigeants communistes?

19 Juillet 2009 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Théorie immédiate

"...y a-t-il une action plus grande au monde que la conduite d'un parti? Celle d'une armée a, sans comparaison, moins de ressorts, celle d'un état en a davantage; mais les ressorts n'en sont, à beaucoup près, ni si fragiles, ni si délicats. Enfin je suis persuadé qu'il faut plus de grandes qualités pour former un bon chef de parti que pour faire un bon empereur de l'univers."  Cardinal de Retz

Comme nous n'avons toujours pas choisi (les sortants se sont choisis eux-mêmes) et qu'on nous prépare un congrès de plus pour la fin du printemps 2010 pour bétonner encore plus la position des héritiers de l'appareil, je remets en ligne mes réflexions du mois d'août sur cette question abyssale.


Le problème du pouvoir


Nous, militants communistes du PCF, nous devons dépasser notre horreur anarchisante pour la politique et ses fonctionnements structuraux.  Nous préférons penser que nous sommes tous frères sans affronter le fait que certains frères sont plus grands que d'autres. Nier le politique interne au parti aboutit à des blocages fractionnels, à l'autoritarisme, au suivisme légitimiste des joueurs de flûtes, et en définitive à l'inefficacité dans l'action sur la société et le pouvoir politique.

Comment choisir de bons dirigeants communistes? Doivent-ils être cooptés par des dirigeants expérimentés et déjà en place? Doivent-ils être désignés par le vote des militants communistes, comme si le parti était une sorte de nation dotée d'un État? Doivent-ils être désignés, d'une manière plus large par le prolétariat, ou par le peuple que le PC est supposé représenter historiquement, ce qui concrètement signifie qu'ils ont obtenu sur leur nom des succès électoraux ou une notoriété par des moyens médiatiques, et donc une popularité qui dépasse les rangs communistes? Au fond, quels doivent être les critères de sélection? Que faire lorsque des non-communistes s'emparent de la direction ?

D'abord il ne peut pas y avoir de bonne direction d'un parti communiste qui ne lutte pas effectivement contre le capitalisme, au point de susciter l'hostilité manifeste et concrète de ses représentants : il faut que le pouvoir politique et économique nous combatte suffisamment pour décourager les carrières opportunistes que le financement public et européen tend à multiplier. Un parti communiste ne peut donc avoir de bons dirigeants que s'il suit une ligne ferme, qui est ressentie comme dangereuse et potentiellement révolutionnaire par ses adversaires. Un bon groupe dirigeant tisse des alliances, mais forcément s'il agit vraiment suscite l'hostilité de la bourgeoisie et de ses médias, à la manière de Chavez, et non l'indifférence ou le mépris. J'ai entendu l'épouse d'un grand financier français, un des piliers de la bourgeoisie de ce pays, décrire MGB qu'elle avait sans doute rencontrée dans la tribune officielle au Stade de France comme très sympathique. C'est mauvais signe.


Que disent les livres ?


Dans la littérature marxiste que j'ai pu lire, ces problèmes ne sont pas abordés directement. Sauf Lénine, qui publie une importante littérature de combat dans les luttes internes du parti bolchevik (dont Que Faire ?) et Trotski qui a tenté, à mon avis en vain, de trouver une solution à ce qu'il analysait comme une dégénérescence de l'État soviétique qu'il avait contribué à créer. En gros, Trotski est démocrate de manière inversement proportionnelle à sa distance à l'exercice du pouvoir effectif ; très peu à Moscou, beaucoup à Mexico. De même Rosa Luxembourg qui ne parvient pas à un point de vue critique cohérent sur la révolution d'Octobre. On ne lui en a d'ailleurs pas laissé le temps. On constate en fait chez tous ces théoriciens et praticiens de la révolution une oscillation entre des exigences démocratiques et des nécessités dictatoriales. Cette difficulté est originaire dans le mouvement ouvrier révolutionnaire et marxiste puisqu'il a pour but, dialectique sinon contradictoire, de conquérir l'État et de faire la guerre pour supprimer l'État et la guerre.

Par contre les stratèges classiques ne s'embarrassent pas plus que Staline de ce genre de question : dans l'Art de la Guerre de Sun Zu, et aussi dans Clausewitz : De la Guerre, l'un des problèmes stratégiques les plus importants est le choix du général en chef. Un dirigeant politique n'est pas assimilable à 100% à un chef de guerre, mais ils ont beaucoup de points communs. Il doit avoir courage, esprit de décision, fermeté dans les principes et souplesse dans leur application, présence d'esprit dans le danger, capacité d'expression publique, connaissance synthétique du terrain, sens de la délégation de pouvoir, finesse dans le maniement des hommes, charisme, etc. Ils ne doivent, ni l'un ni l'autre être de purs intellectuels. Musil dit que pour un grand général la maîtrise des quatre opérations de calcul élémentaire suffit bien! Pour un général d'armée bourgeoise, certainement. Mais le dirigeant d'une organisation révolutionnaire doit avoir des capacités théoriques, si possibles acquises dans l'action plutôt que sur les bancs de l'école. Il doit aussi être dévoué à la cause du peuple et de la Révolution.

D'où vient ce dévouement chez un individu qui a ou qui va acquérir rapidement les moyens du succès bourgeois, à la manière des soixante-huitards, si fructueusement enrôlés dans la défense et l'illustration du système passés l'âge de trente ans ? Le dirigeant communiste et révolutionnaire, forcément produit par la société qu'il veut révolutionner,  et qui a bénéficié d'une manière ou d'une autre d'une formation de cadre, d'intellectuel, privilège onéreux et rare, doit avoir aussi une querelle personnelle profonde qui explique son engagement. L'altruisme ne suffit pas à fonder la confiance. On peut prendre l'exemple d'Epstein, jeune intellectuel juif polonais issu d'une famille fortunée qui rêvait d'une carrière d'officier, qui en fut empêché par l'antisémitisme endémique avant guerre dans son pays, qui émigra en France et devint communiste, pour mourir en héros dans la Résistance. S'il avait été admis dans l'académie militaire dont il rêvait, serait-il devenu un héros communiste ? ou plutôt un patriote nationaliste polonais ?  Si le dirigeant communiste est d'origine populaire, sans passage par une formation universitaire (mais c'est de plus en plus rare) c'est loin d'être une garantie contre une évolution opportuniste. Mais dans ce cas une part de sa querelle est transparente. Quelle qu'elle soit,  la résolution de cette querelle privée peut le conduire soit à une réconciliation à bon marché après quelques succès, soit  vers la violence qui excède parfois démesurément la contre violence dont il faut nécessairement user contre la bourgeoisie. Mais sans ressentiment privé, pas d'engagement public. Certes le désintéressement est un critère mais il doit lui aussi être expliqué. Et des leaders politiques désintéressés existent dans tous les partis.

On peut utiliser pour se faire une idée les traités classiques de la politique, sur les dirigeants leur formation, leurs qualités. Le plus célèbre, Le Prince de Machiavel, (Italie, début XVIème siècle) est lu le plus souvent comme une livre abstrait, soit comme un plat éloge du cynisme, soit comme une sorte de dévoilement critique des méthodes du pouvoir. Il ne répond pas vraiment à la question du choix et du mode de désignation des dirigeants. Pour Gramsci,  les Cahiers de Prison, c'est le parti communiste lui même et tout entier qui est le "Prince", ce qui est un concept audacieux en ce qu'il affirme clairement que la transparence n'est pas exigible d'une direction politique réellement agissante, mais ne laisse pas d'être un peu inquiétant. En tout cas, impossible d'opposer sur ce plan un Gramsci démocrate à un Staline « trop brutal ». Cela signifie qu'au vu de la grandeur de son objectif le parti a tous les droits, il n'a aucun frein. C'est bien ce que pensaient de nombreux camarades plus ou moins consciemment, avant le XXème congrès du PC de l'URSS en 1955, et nous vivons dans la nostalgie ( ou le remords, ce qui est la même chose)de cette  époque quand comme dirait Musil, L'homme sans Qualité, dans ce roman autrichien de l'entre deux guerres qui concerne dans sa première partie, la nature de l'action, du pouvoir et de la décision politique, "notre doctrine était si sainte qu'elle effaçait tous nos péchés"! (Mais Musil pour sa part tourne autour du pot et fait mine de prendre le marxisme de haut !)

Mais cette situation du parti et de ses dirigeants au dessus de la critique morale de premier degré (car ils ont une morale, mais pas une morale manifestement fausse aux yeux de tous comme « nos solidarités sont plus fortes que leur égoïsme »), lorsqu'ils agissent révolutionnairement ne signifie pas qu'il soit au dessus de la critique rationnelle, et d'abord celle des faits.

Parmi les livres les plus célèbres sur la formation d'un groupe dirigeant Il y a le Courtisan de Castiglione (Italie, début XVIème siècle) et l'Homme de Cour de Gracian  qui sont des traités de savoir vivre, savoir être et savoir se conduire, savoir attendre et agir au moment opportun, qui renseignent sur la vie de cour pendant la Renaissance, mais qui en disent beaucoup sur tous les cercles humains où agissent les hommes (et maintenant aussi les femmes) de pouvoir. Partout où il y a pouvoir il y a une sorte de "cour" et tous les dirigeants ont été aussi dirigés au début, et la plupart sont en fait à la fois dirigeants et dirigés et vivent dans l'intrigue permanente, font des plans de carrière, calculent leurs réseau de relation et  ourdissent des conspirations petites et grandes. Le critère d'un bon dirigeant n'est pas la transparence. Il doit être perpétuellement prêt à saisir l'occasion d'augmenter le pouvoir dont il dispose, car sa compétence sans le pouvoir n'est rien. Le critère d'un dirigeant méprisable n'est pas l'ambition, mais la bassesse qu'elle révèle implacablement en celui qui est flagorneur avec ceux qui le dirigent et hautain avec ses subordonnées. Donc à consulter pour comprendre la sociologie et la logique des milieux de pouvoir, également les Mémoires de Saint Simon (XVIIIème siècle) et celles du Cardinal de Retz (XVIIème) sur le jeu conspiratif, qui a inspiré la pratique situationniste de Debord, qui n'a pas été d'importance totalement nulle, contrairement à sa théorie. Et aussi je pense utile de lire, sur la « société » et ses pouvoirs Le coté de Guermantes, de Marcel Proust.

Ces ouvrages classiques de la civilité politique moderne ont le mérite de faire observer que le dirigeant n'apparaît pas n'importe où, le dirigeant pousse à l'ombre du pouvoir comme les pommiers naissent là où tombent les pommes. Il s'agit d'une spécialisation poussée avec sa culture technique spécifique,  avec deux sous-spécialisations : gestion, et stratégie. Le dirigeant communiste ne peux pas avoir la même culture spécifique que le dirigeant de n'importe quel autre parti, bref il ne peut pas surgir d'un Institut d'Étude Politique (mais il peut s'agir à l'origine d'un étudiant en échec en querelle contre le système qui l'exclut, quoique cette silhouette soit plutôt celle de petits chefs gauchistes ou terroristes). Mais il ne peut pas non plus émerger de la base en toute candeur, sur ses mérites bien sélectionnés. Un dirigeant paraît donc dans un milieu politique dont l'éthique et la règle sont spécifiques  à l'exercice du pouvoir, et bien distinctes de celles qui sont pratiquée dans la vie quotidienne, ou s'il n'y apparaît pas, il s'y adapte très vite sous peine de disparaître. Ceux qui ne le font pas, ou qui comme Allende décident de ne plus jouer le jeu obtiennent au mieux la palme du martyr. C'est une difficulté pour une organisation de libération du prolétariat, dont l'horizon est la pratique de tous et la vie quotidienne, et non le spectacle que l'élite se donne à elle-même et au peuple. Mais un dirigeant bourgeois est bien distinct d'un bourgeois normal. Il doit en être de même dans une organisation prolétarienne.

 

Que montrent par leur action les révolutionnaires réels?


Il ne suffit pas de critiquer les dirigeants, il faut aussi pouvoir dire comment ils devraient agir pour être de bons dirigeants communistes. Beaucoup de dirigeants qui ont mérité un grand respect de la base militante, et sont devenu parfois des hommes d'états respectés bien au delà des rangs communistes. Des non-communistes, compagnons de route, peuvent aussi servir d'exemple.

Les dirigeants communistes historiques se divisent en deux catégories, en excluant ceux qui n'ont pas véritablement agi : les victorieux (Lénine, Staline, Mao, Kim Il Sung, Thorez, Fidel, Ho Chi Minh, Giap)  et les malchanceux (Gramsci, Rosa Luxembourg,  Trotski, Boukharine, Guevara, Allende, Lumumba, Sankara, Honecker, Marulanda).Il faut remarquer que Marx et Engels on joué un rôle de dirigeant, pas toujours victorieux dans les luttes internes de l'Internationale qui les range plutôt dans la deuxième catégorie. Si c'est une nouvelle forme d'organisation du parti que l'on recherche il ne faut surtout pas "retourner à Marx" comme le veulent nos refondateurs. Les insuffisances des théories politiques (par contraste avec l'économie et l'histoire, voire la psychologie) de Marx et Engels sont criantes (voir l'article d'Yves Vargas sur Marx, dans La Puissance du Peuple 2). Dans la lutte politique, ils ont eu le mérite de maintenir ouverte la perspective de la lutte pour le pouvoir, contre les illusions anarchistes d'une auto-organisation non politique des ouvriers, mais la concurrence avec les anarchistes leur a fait assigner à l'État révolutionnaire la tâche problématique de son propre dépassement. Lire sur cette question  Fuir l'histoire, Domenico Losurdo

Les perdants malchanceux bénéficient de la sympathie romantique des jeunes des générations suivantes, et même parfois d'une apparence de « fair play » de la part des journalistes et historiens de l'ennemi de classe, mais leurs idées sur l'organisation et la lutte doivent être analysée avec le recul de l'expérience. Quelque chose n'a pas dû être bon dans leurs idées puisqu'ils ont échoué. Sauf dans le cas du deuxième Gramsci, qui justement réfléchit longuement sur cet échec au fond de sa prison.

Les victorieux ont en général gagné la bataille de la prise du pouvoir, ou la victoire militaire, uniquement pour se trouver placés au niveau supérieur devant d'autres énigmes, et lancés dans le combat douteux de la consolidation du pouvoir d'État.

Pendant longtemps les dirigeants communistes ont été choisis dans le meilleur des cas sur le modèle implicite du Courtisan de Castiglione, sans que ce traité ne soit connu dans la culture marxiste : cooptation de militants dotés de qualités exceptionnelles de fermeté et de culture par un groupe de dirigeants plus âgés. Mais dont les qualités en question se sont fait valoir en se rendant indispensable à l'action des cercles qui les ont cooptés. C'est au fond le mode de recrutement de tous les groupes dirigeants actifs (entreprises, cercles politiques, lobby). Ce n'est pas démocratique en ce sens que le jugement sur le potentiel des futurs dirigeants est laissé aux vieux les plus expérimentés. Mais on peut argumenter pour défendre cette pratique qui a été souvent la seule possible.

La question est là : un PC est il une société en réduction dont les dirigeants reflètent l'opinion publique, la "base" ? Ou bien une organisation de combat pré positionnée en temps de paix qui attend la révolution? Au risque de se trouver cantonnée à l'entrée du Désert des Tartares (Buzzati) ? Or il ne peut pas être l'un sans l'autre. Sinon c'est soit un groupuscule avec toute la misère de ce genre d'organisme, soit une assemblée d'opportunistes et de carriéristes. C'est cette tension interne qui fait la spécificité et la richesse de partis issus de la troisième internationale.Il faut donc juger correctement du moment de la conjoncture historique : sommes-nous dans un moment de risque de sectarisme gauchiste ou d'opportunisme économiste (en sachant que l'un sert parfois de masque à l'autre) ? Bien sûr tout le monde voit en ce moment que le risque principal est le second. Et le premier est par contre la plaie de l'opposition communiste dans le PCF.


Autre point importantissime, comment contrôler cette direction si et quand la base commence à trouver qu'elle déraille complètement? Il semble qu'il faut construire des règles de fonctionnement qui permettent de concilier représentativité et efficacité. Le pur et simple recours au suffrage universel peut aboutir à l'élection d'un dirigeant non-communiste : il suffit que suffisamment de non communistes adhérent au parti. Cela dit la cooptation aboutit manifestement au même résultat, par constitution de couche bureaucratique.

On peut imaginer créer un groupe de clercs qui surveillent l'orthodoxie des dirigeants, des motions  etc. C'était la prégnance de l'idéologie révolutionnaire qui venait empêcher les dirigeants de coopter n'importe qui. Mais c'est donner une importance très grande aux intellectuels spécifiques qui ont fait leur classe "au dehors". Donner aussi une prime à l'idéalisme spontané dans la mentalité des clercs. Au reste, ça ressemble plus à l'organisation de la république islamique d'Iran, qu'à un parti communiste ! Lénine dans Que Faire ? dit  que la conscience vient du dehors au prolétariat, mais il ne veut pas dire par là que les clercs doivent commander, il dit simplement que l'explication théorique rigoureuse est une affaire de clercs.

Mais le rôle des intellectuels reste important dans la création d'une cohérence idéologique. Le parti est aussi un milieu culturel cohérent, tout en étant assez lié à l'action pratique (et pratiquement réformiste) pour ne pas dégénérer en secte. Les dirigeants principaux doivent refléter cette dualité, dans leur biographie. Ce qui empêchait autrefois des dérives postcommunistes  était en soi la valeur nominale du terme "communiste" qui était (et est encore) impossible à endosser par ceux qui n'ont qu'un plat avenir d'opportuniste. C'est pourquoi l'horizon de tous les opportunistes est la sortie du communisme.

Il faut aussi noter sur le « dehors », c'est à dire la société bourgeoise et son système éducatif, qu'il n'est plus à même de former un matériel humain assez solide pour jouer le rôle de révolutionnaire professionnels comme le furent Lénine, Staline, Trotski, Mao, etc.


Conclusion :


En conclusion sur ces observations, le dirigeant communiste actuel doit avoir une expérience du travail réel, si possible dans la production. Il doit avoir participé à des luttes concrètes et s'être fait connaître ainsi. Montrer qu'il fréquente les textes théoriques classiques de la Révolution, même s'il n'est pas forcément érudit. Il doit avoir assez de conviction pour marquer les esprits quand il passe dans les médias. Il ne doit pas être trop jeune, parce que dans ce cas son expérience de la vie se limite aux études, puis aux intrigues d'appareils, qui sont inévitables, mais qui ne doivent pas éclipser tout le reste. Il ne doit pas relever d'une secte, d'un parti dans le parti. Il doit avoir une hauteur de vue suffisante pour affronter des questions historiques, et se trouver « là où on ne l'attend pas » ce qui la marque du chef compétent, comme Danielle Bleitrach l'a remarqué pour Chavez. Il va de soi qu'une direction n'est jamais le fait d'un seul, mais une direction efficace met en avant un responsable qui concentre sur sa personne le transfert affectif inévitable en politique. Une organisation révolutionnaire, n'en déplaise aux anarchistes que nous sommes tous plus ou moins, surtout en terre proudhonienne, a des chefs. Le problème ce n'est pas les chefs, c'est avoir le moyen d'en changer quand il le faut, le problème ce n'est pas les chefs, c'est la déférence a priori à leur égard que plus rien ne justifie, à par quelques avantages matériels : les héros de la Guerre d'Espagne, de la Résistance et de la Décolonisation ne sont plus là. Et de toute manière, « héros » ce n'est pas un statut (une statue, tout au plus).


 Le dirigeant-chef doit aussi consulter la base du parti non pour la forme, mais par nécessité, parce qu'en définitive il en est le reflet politique. Mais l'adhésion au parti étant souvent une adhésion aux thèses et à ligne de la direction du parti, le dirigeant communiste réel peut très bien se trouver en opposition avec les idées d'une majorité du parti, et rester légitime (cela a été le cas plusieurs fois de Lénine, tandis que Staline a toujours veillé à sa popularité interne). Le débat devant tendre à clarifier, qui est communiste, et qui ne l'est pas, (ou plus). Il est souhaitable que les postcommunistes soient mis en minorité, mais ce n'est pas indispensable, parce que ce n'est pas une histoire de majorité légitime, mais de ligne juste. Et devant l'évidence de la ligne juste, les camarades de bonne foi rectifient les positions erronées qu'ils ont adoptées sous l'influence de l'autorité des membres influents, mais droitiers, du groupe dirigeant. Une ligne juste crée les conditions de l'hégémonie (PC portugais), d'une bonne refondation (PC tchèque) ou de la scission réussie (KKE grec). Mais ce n'est pas une affaire de virgules, c'est avant tout une affaire de stratégie réussie, et donc de bonne direction. La direction que nous avons n'a qu'un but : aller vers le postcommunisme, vers le dépassement du PCF. Les organisations ne sont pas éternelles, mais une organisation à vocation révolutionnaire ne peut être dépassée que par une révolution. Il nous faut donc des dirigeants communistes bien choisis.


GQ, 16 août 2008

Et sur les mauvais dirigeants et leurs mauvaises pratiques : Dans la lutte de classe au PCF, qui pense que "Staline avait raison"? (19/01/2009 publié dans : démocratiser le PCF

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M
Moi ,mais c'est affevtif,je mettrai HoChiMin 
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G
Je propose un concours du meilleur dirigeant communiste. Pour les contemporains, ce sont les népalais qui ont l'air de tenir la corde (voir "nouveau Népal"). Toutes catégories, je penche pour Mao Tsé Toung.
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