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Réveil Communiste

Compte rendu critique de "Le Capital au 21ème Siècle" de Thomas Piketty, par JC Delaunay

18 Juillet 2017 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Economie, #Théorie immédiate, #Impérialisme, #Qu'est-ce que la "gauche"

Compte rendu critique du livre de Thomas Piketty (illlustration)

 

 

 

 

Le capital au 21ème siècle

Par Jean Claude Delaunay[1]

Résumé de l’article

L’importance du livre de Piketty est due à son inspiration de réformisme social-démocrate : Tout autour de la planète il est reconnu que le système capitaliste ne fonctionne pas bien et que la catastrophe guette. Mais la volonté de le changer manque encore.

C’est exactement la position centrale prise par Piketty dans son livre. D’une part il critique les inégalités sociales du système capitaliste. Il souligne le fait que dues à la « globalisation du système capitaliste, les inégalités qu’engendre le Capital augmentent. Il donne à preuve de sa thèse une très grande quantité de statistiques mondiales. D’autre part, il reste favorable au système capitaliste mondialisé dont il pense qu’il est le futur des sociétés. Il ne dit mot de la structure capitaliste construite sur des inégalités fondamentales entre les travailleurs et les capitalistes.

En conséquence, ses propositions pour contrebalancer les inégalités sont des chimères.

Le Capital au 21 siècle a été publié en Septembre 2013 aux éditions du Seuil (Paris) puis en Avril 2014, 7 mois plus tard, aux Presses de l’Université de Harvard (Cambridge M.A). Compte tenu de la taille du livre (950 pages, table des matières non comprise) une aussi volumineuse publication scientifique dans le domaine de l’économie est une opération très idéologique et en même temps commerciale. Avec cette publication est-ce un prix Nobel qui est visé ? Bien écrit, ce livre n’est pas de lecture facile. En 2014, Chen Ping en a rendu compte dans un article intéressant de la World Review of Political Economy. Cependant il peut être fructueux de suivre plusieurs approches pour lire un livre.

Qui est Piketty ?

Le capital au 21ème siècle n’est pas sa première publication. Diplômé de l’Ecole Normale Supérieure de Paris, il est Directeur de Recherche à l’EHESS et Professeur en Sciences Economiques.

Il a suivi la route franco-atlantique, revenant en France après une formation académique aux USA, ce qui est devenu un cursus classique pour les élites de la grande bourgeoisie en France.

Il est à la fois un membre actif de ce groupe idéologiquement divers des « radicaux états-uniens » et en même temps proche du Parti Socialiste Français.

Il en est peut-être membre mais ceci n’a pas d’importance dans cet article. Dans la biographie de Piketty, que donne Wikipedia, l’Encyclopédie de libre accès, il aurait reconnu avoir, en 2003, rejoint le Conseil scientifique de l’association fondée par M. Rocard et D. Strauss-Kahn, « Une gauche en Europe ». Il collabore avec le quotidien Libération et parfois avec Le Monde. Il a été l’un des conseiller de S. Royal en 2007, et a signé l’appel à voter F. Hollande, paru dans Le Monde en Avril 2012, « Appel des 32 économistes ». Cependant, il déclare qu’il ne saurait confondre, en tant qu’économiste, son travail scientifique et ses motivations politiques. « Que les choses soient bien claires : mon propos ici n’est pas d’instruire le procès des travailleurs contre les possédants mais plutôt d’aider chacun à préciser sa pensée et à se faire une idée. » (Piketty 2013, 74)[2].

Piketty n’est pas marxiste. Je ne peux l’en blâmer, suivant en cela l’assertion de K. Marx lui-même, et moi (JCD) non plus d’ailleurs. Mais la génération de Piketty, témoigne, en comparaison avec la mienne, d’une relation profondément différente avec l’œuvre de Marx.

Il fut un temps où dans les universités françaises, les personnes étaient explicitement pour ou contre Marx. Si nous étions POUR, les noms d’Engels et de Lénine étaient considérés, sur le champ, comme les premiers auteurs qu’il nous fallait étudier. Aujourd’hui Marx n’est plus qu’un auteur comme les autres. D’une certaine façon, cette banalisation est positive: Elle signale que Marx est passé du côté des auteurs « classiques ».

A l’occasion Piketty lui fait compliment, déclarant que Marx propose une analyse intéressante (Piketty 2013, 93). Nous pouvons aussi considérer que son opus, Le Capital au 21ème siècle, présente une évidente connotation avec Le Capital, l’œuvre de Marx. Piketty consacre à Marx 4 pages à la fin du 6ème chapitre. De-ci de-là, il éparpille des références à Marx. Evidemment Piketty s’efforce de montrer, à chaque fois, que sa façon de penser est bien supérieure à celle de Marx. Cependant, fait obstacle à cette revendication de supériorité l’absence d’une étude critique des schèmes, concepts et résultats de Marx. Piketty ne connait à peu près rien à cet auteur. Comment peut-il le critiquer scientifiquement? La brièveté de son traitement de Marx n’est pas surprenante. Les idées dominantes sont toujours celles de la classe dominante, laquelle, aujourd’hui dans les pays développés, est la grande bourgeoisie.

La conclusion de ce court premier point est la suivante : Piketty a écrit un livre dans lequel il s’efforce d’élaborer une nouvelle idéologie socialiste. Le sens de socialiste est celui défini par les partis réformistes et sociaux-démocrates. Cette nouvelle idéologie devrait se fonder sur l’observation des inégalités. Il n’est pas opposé au capitalisme, qui d’après lui est le seul système qui fonctionne, tant économiquement que socialement; mais il est contre les inégalités qui s’y développent. Dans le contexte de la présente crise économique de longue durée, nous pouvons comprendre le succès de son livre. La plupart des personnes ne sont pas satisfaites du système capitaliste mais elles ne sont pas persuadées que le socialisme scientifique mis en perspective par Marx, Lénine, soit une alternative adaptée.

Le schème central et les découvertes de Piketty

Pour Piketty, le problème central que les économistes doivent résoudre est celui des inégalités : C’est un postulat, ce qui dispense de tout développement justificatif.

Selon lui, les pères de la science économique, tels qu’Adam Smith et David Ricardo, avaient raison au 19ème siècle de traiter ce problème, mais, dit-il, leurs méthodes et leurs conceptions étaient erronées. De même, d’après Piketty, Kuznets a eu tort de penser que les inégalités seraient réduites par le développement économique. Piketty pense que le problème des inégalités, dans son ensemble, doit être revisité et il se propose de trouver la meilleure façon de le faire. Pour cela il va explorer deux champs d’étude : la théorie et les statistiques.

Théorie

D’évidence, pour lui, la racine des inégalités économiques se trouve dans la répartition du revenu national et en conséquence du revenu global : Plus certain(e)s reçoivent de revenu macro-économique, moins les autres en reçoivent. Mais selon Piketty, les économistes doivent prendre en considération d’autres variables que le rapport des forces pour expliquer correctement comment se passe cette répartition. La variable clé de son étude et de son explication est le rapport K/Y. Si nous connaissons l’évolution de ce rapport et si nous avons quelques idées simples de la manière dont le taux d’intérêt macro-économique évolue, nous connaissons comment Y va se répartir.

K représente le Capital, Y représente le produit intérieur brut, P le profit national. On peut écrire :

P/Y = (P/K) / (Y/K)

Avec P/K égale ρ (rho), le taux de profit macroéconomique, et K/Y= β, il s’ensuit que la part du capital dans le revenu total est : P/Y = ρ. β

A partir de là, nous déduisons automatiquement la part qui revient aux autres agents économiques.

Pour Piketty, les économistes doivent centrer leur recherche sur β dont il dit que c’est la clé du fonctionnement économique, et par conséquent le point original de son propre travail.

L’explication qu’il donne de β, vient du modèle de croissance économique de Harrod-Domar selon lequel le taux de croissance est g= s / β (g, le taux de croissance, est égal au rapport entre le taux d’épargne et la productivité du capital).

De ce résultat théorique simplifié, Piketty déduit la relation β=s/g. C’est là le fondement théorique de son livre. S’appuyant sur ce qu’il nomme « les lois fondamentales du capitalisme », sa recherche peut être comprise facilement. Il analyse d’abord Y et propose une estimation du futur de Y et de g à un niveau national et global. Puis il analyse s et son évolution future aux niveaux national et global. Au final, selon ses diverses estimations, il peut prédire le futur de β et celui de P/Y en prenant en compte des estimations complémentaires relatives à l’évolution de ρ.

Les statistiques.

Ces 50 dernières années, l’utilisation de plus en plus de données statistiques a augmenté le pouvoir des théories économiques. Mais le bénéfice tiré de cette amélioration a été détruit par la confiance scientiste et non scientifique dans l’économétrie sophistiquée. La plupart des professionnels de l’économie ont pensé que les statistiques utilisées avec l’aide de modèles économiques étaient susceptibles d’amener les explications économiques à une hauteur scientifique jamais atteinte jusqu’alors. En réalité nous (JCD) pouvons dire que ces économistes ont été, la plupart du temps, aveugles. La crise de 2008 leur a explosé à la figure et encore aujourd’hui, ils ne sont pas capables de dire quoi que ce soit de convainquant en terme d’explications ou de propositions pour y faire face.

Je comprends l’utilisation des statistiques par Piketty comme une réaction à la conception scientiste des statistiques. Il s’efforce de construire des séries de longue durée, et en faisant confiance à « son pouce » pour les faire défiler ou s’arrêter, il essaie de comprendre l’évolution des variables choisies par lui. Cette règle du défilement-arrêt laissé au hasard n’est certainement pas pire que l’aveugle utilisation de modèles économétriques, surtout si les séries portent sur une très longue période, depuis 1700 quand c’est possible, et pour le plus grand nombre possible de pays .Utilisant les résultats de comptabilité nationale, nous pouvons supposer qu’il est en mesure de donner un socle de réelle solidité empirique à ses résultats.

Sur ces deux points -théorie et statistiques- je conclus que le livre de Piketty est la combinaison d’un cadre théorique simple avec un fort appareillage de séries de comptes nationaux.

Ce que Piketty a trouvé quant à l’inégalité globale.

Il y a 2 sortes de résultats dans le livre de Piketty : Les résultats qu’il essaya d’obtenir et ceux que nous pouvons trouver par les séries statistiques publiées mais qui mènent à des conclusions qu’il ne veut pas ou qu’il ne peut pas tirer.

Les inégalités économiques entre groupes de personnes appartiennent à la 1ère catégorie de résultats. Bien sûr, comme il était à la recherche d’inégalités, Piketty aurait dû étudier les inégalités entre nations et entre continents. Mais comme déjà signalé, il n’est pas concerné par ce qu’en a dit Marx, et Lénine encore moins, notamment, les vues de celui-ci sur le développement inégal du capitalisme au niveau des nations. Le seul point que remarque Piketty à ce sujet, c’est que l’Afrique doit rembourser annuellement, à ses créditeurs étrangers, 5% et jusqu’à 10% pour certains pays, des revenus du continent. L’Afrique semble être la propriété globalisée des pays capitalistes. C’est là un des aspects de l’impérialisme contemporain.

Le noyau dur de son livre, traite d’une autre question en débat. Le capitalisme engendre en permanence des inégalités entre les groupes de personnes et cela sans limitation spontanée.

Il n’y a pas de mécanisme correcteur du genre de ceux envisagés par Kuznets. La seule façon de corriger et compenser ces inégalités, selon Piketty, c’est de promouvoir des taxes sur le capital, et ce à l’échelle globale. Au 20ème siècle il y a eu la révolution de l’impôt sur le revenu. Le 21ème siècle devrait être celui de la révolution d’un impôt sur le capital, à l’échelle mondiale ou plus modestement à l’échelle de l’Europe.

Concrètement, Piketty présente des résultats statistiques intéressants (Houben 2014). Par exemple il montre que les inégalités prennent naissance dans le capital et non dans les salaires, même si des gestionnaires de groupes multinationaux touchent de très hauts salaires. En réalités ces salariés font partie des classes dirigeantes. Il montre que la société Nord-Américaine est, depuis les années 1970, la société la plus inégalitaire du monde. Auparavant, la plus forte inégalité se trouvait dans les pays européens les plus développés. Il montre aussi que depuis les années 1970, le capital privé se reconstitue rapidement et que toutes choses égales par ailleurs, le pouvoir des capitalistes au 21ème siècle devrait dépasser celui qu’ils exerçaient au 19ème siècle. En conséquence, il suggère la mise en œuvre d’une augmentation de la taxe sur le capital.

Points d’intérêt

Le livre de Piketty est un très gros livre. Il n’est pas certain que tout un chacun puisse le digérer dans son entièreté. Mais s’il le fait, il pourra y découvrir plusieurs points d’intérêt. Je vais ici mettre l’accent sur 4 d’entre eux.

Les structures de l’ Impérialisme

Les statistiques sur le temps long peuvent apporter en sous-produit des résultats surprenants. Dans le cas du livre de Piketty, un de ces sous-produits est la description des structures passées et présentes de l’impérialisme.

De fait, se pose aujourd’hui une question légitime et générale sur les informations fournies par les comptabilités nationales. Ont-elles encore un sens en cet âge de mondialisation capitaliste dans lequel le capital circule plus librement entre les nations ?

Pouvons-nous encore parler en terme de production intérieure ou de capital national si le capital de chaque pays est de plus en plus dispersé de par le monde, tout en se mélangeant à du capital venu d’autres pays ? La réponse implicite de Piketty est « Yes ».

En voici la raison : « A ce stade, contentons-nous de noter que la plupart des pays riches ou émergents, sont dans des situations plus équilibrées que ce que l’on imagine parfois. En France comme aux USA, en Allemagne comme en UK, en Chine comme au Brésil, au Japon comme en Italie, le revenu national n’est aujourd’hui pas très différent de la production intérieure. Autrement dit, dans tous ces pays, les flux entrants et sortants, de profits, d’intérêts de dividendes, de loyers, et cetera, s’équilibrent à peu près, avec généralement des revenus reçus de l’étranger légèrement positifs pour les pays riches. Contrairement à une légende tenace, la France n’est pas possédée par les fonds de pension californiens ou la banque de Chine, pas plus que les USA ne sont la propriété des investisseurs japonais ou allemands…Aujourd’hui, la réalité est que l’inégalité du capital est beaucoup plus domestique. Elle oppose davantage les riches et les pauvres à l’intérieur de chaque pays. » (Piketty 2013,80).

Cette conclusion ne peut être prise pour argent comptant. Elle mène à penser que l’économie du capitalisme globalisé est équilibrée.

D’abord, ce n’est pas vrai pour tous de par le monde. Piketty (2013, 118) le dit lui-même, les pays africains payent 5% en moyenne de leur revenu annuel (10% pour certains) au reste du monde. Cela veut dire que sur le plan des actifs, l’Afrique est en position négative. Ce continent est en partie la propriété du reste du monde.

En second, nous devons nous méfier de la valeur des données comptables agrégées. Les investissements en France d’un investisseur japonais dans la production de fast food -fish and chips- n’a pas le même effet sur la stratégie du pays que les investissements du même investisseur dans la production d’énergie nucléaire.

En trois, les résultats présentés par Piketty sont vrais un temps, mais ils ne sont que les instantanées d’une réalité qui n’arrête pas de changer. Nous ne pouvons déduire une loi générale d’évolution de ces seules données : Une description en a été faite à un certain moment ; mais qu’en sera-t-il demain de la situation observée ce jour ?

Quatrième remarque : l’impérialisme contemporain, malgré son aspect statistique équilibré n’en est pas moins mis en difficulté par de fortes contradictions internes.

Ces 4 points ayant été exposés, voici 2 conclusions que je tire, directement ou indirectement, de son livre concernant l’Impérialisme.

a) La première est historique. Les flux de revenus et de capital sont insuffisants, de façon évidente, pour décrire la dimension économique de l’Impérialisme, cette forme de capitalisme mise en place depuis la fin du 19ème siècle. Ce point admis, nous pouvons percevoir, dans l’information donnée par Piketty, une grande différence entre d’une part, l’Impérialisme antérieur à la 1ère guerre mondiale, décrit par Hobson (1902) et Lénine (1917), et d’autre part l’Impérialisme d’aujourd’hui.

Lénine décrivait l’impérialisme planétaire comme dominé par la bourgeoisie britannique. Il y avait un petit nombre d’Empires distincts. Leurs structures financières étaient d’un type allemand (interpénétration directe des industries et des banques). Aujourd’hui, le pouvoir impérialiste dominant est celui de la bourgeoisie nord-américaine. Sa façon de contrôler le monde économique est différente. L’interpénétration des banques et de l’industrie se fait sur les marchés financiers, ce qui permet une grande mobilité du capital et l’implication directe des particuliers (de ceux qui détiennent un peu de plus-value ou d’épargne) dans la pratique et l’idéologie impérialiste.

Au temps de Lénine, la bourgeoisie du Royaume Uni recevait 10% de revenu supplémentaire du reste du monde, celle de la France 5% (Piketty 2013,119). Les bourgeoisies nationales déclenchèrent la guerre 1914-1918 pour défendre leur part de gâteau.

En 2014, par contre, l’impérialisme parait être interconnecté. C’est un impérialisme diffus. Chaque bourgeoisie nationale investit autour du monde et en retire un montant en flux entrant et sortant qui serait grosso-modo en équilibre, à l’exception de l’Afrique, devenue une sorte de propriété en commun de l’Impérialisme mondial.

b) La deuxième conclusion que je déduis du travail de Piketty concernant l’impérialisme est que ce dernier fonctionne aujourd’hui comme « un système global pour la gestion et l’exploitation de la main-d’œuvre et pour la défense des structures capitalistes ». Ce n’est pas seulement un système d’exploitation économique dans lequel le dollar US serait la monnaie mondiale. C’est aussi un système politique dédié à la défense de l’ordre capitaliste aux commandes duquel se trouvent les USA agissant par diverses coalitions.

A cause de son caractère explicitement diffus, l’impérialisme contemporain nécessite un chef, les USA, qui jouent le rôle d’assurer le contrôle monétaire, militaire, technologique, juridique, idéologique du Monde. Autour de ce pays, qui a la taille d’un continent, existe un système de gouvernance multinationale traversé par de fortes contradictions internes.

Les bourgeoisies capitalistes globalisées développent aujourd’hui leurs stratégies dans un contexte global, et augmentent leur domination dans le contexte global de la lutte des classes. Elles sont soutenues dans ce but par des bureaucraties globales (Le Fonds Monétaire International, la Banque mondiale, l’Organisation Mondiale du Commerce). Mais il leur faut aussi le soutien de leurs états nationaux. Elles s’efforcent donc, même à fort coût, de maintenir leur pouvoir politique à la tête de ces entités. De toute évidence, elles détruisent la protection sociale de « l’Etat providence », et jusqu’à un certain point les entités nationales elles-mêmes. Mais leurs dirigeants politiques se « pensent nationaux » et se proclament « nationaux ». Et pour cause, c’est qu’ils ont encore besoin de « leurs » Etats[3].Le Parti Socialiste français, qui se veut depuis la Première Guerre Mondiale et depuis Léon Blum un partenaire loyal du capitalisme, adapta son comportement à cette tendance globale. Il est devenu, à la mi-temps des années 1980, un supporter explicite de la globalisation capitaliste, tout en proclamant son engagement sur des valeurs nationales et de façon croissante en Europe, son engagement au traité de Maastricht.

 

La société industrielle capitaliste

Si je m’interroge sur ce qu’est « le capitalisme industriel », je ne suis pas capable de répondre à cette question par la seule lecture du livre de Piketty. Mais c’est différent si ma question est « Quelles sont les principales caractéristiques d’une société industrielle capitaliste ? ». Le paradoxe du livre de Piketty, à mon avis, est qu’il donne une explication des traits principaux d’une société crée par le capitalisme industriel sans donner une explication du fonctionnement du capitalisme industriel.

Le capitalisme est un mode de production, qui décolla il y a 300 ans et se développa par un processus d’accumulation du capital plus rapide et plus intensif que les modes de production antérieurs. Pendant 3 siècles le capital industriel a d’abord transformé de fond en comble, les sociétés dans lesquelles il s’était installé. Ensuite le capitalisme industriel changea la structure concrète, interne du capital lui-même. Au 18ème siècle la forme dominante du capital était le capital terrien. Aujourd’hui, c’est un capitalisme professionnel, financier, administratif, immobilier (Piketty 2013 190,192, 217).

La société crée par le capitalisme industriel serait devenue au 21ème siècle la combinaison de 4 modalités de vie sociale.

a) La nature du capitalisme industriel est d’être industriel, cela va de soi. L’évolution contemporaine du capitalisme industriel a pour résultat l’industrialisation des 3 secteurs majeurs de l’économie (l’agriculture, l’industrie, les services). Dans les pays développés, le capital industriel total est aujourd’hui le double du revenu national.

b) En orbite autour de ce cœur industriel, la société capitaliste disposerait de moyens pour diriger la vie collective et future de ces membres. La société capitaliste s’est bureaucratisée en même temps qu’elle s’est complexifiée. L’activité étatique tend aussi à s’industrialiser. L’Etat accumule du capital et des savoirs bien plus que ne le font tous les autres secteurs. Cependant les lois du fonctionnement du secteur étatique sont, pour la plupart, différentes de celles du secteur industriel privé, même s’il y a des connections entre eux. Comme connu, dans les systèmes capitalistes, l’Etat est utilisé pour renforcer le secteur privé. Mais aujourd’hui, le secteur public et le capital étatique sont les grands absents du capitalisme contemporain[4].

c) La société capitaliste est un moyen de gestion du futur et de l’organisation de la vie individuelle de ses membres. Les dimensions individuelles de la vie sociale étaient également industrialisées au moment où se développèrent la production immobilière, l’urbanisation, les services sociaux, l’industrialisation de la vie quotidienne (ustensiles de ménage, transports urbains et interurbains, domotique). Cette sphère est privée mais c’est un ‘ minerai ‘ pour l’industrie et la banque.

d) La société capitaliste est aussi un outil mental dans les champs comportementaux, les savoirs, les idéologies. Le capitalisme industriel n’est pas juste un outil technique. C’est aussi et en particulier une culture. Cet aspect non-matériel est quasiment impossible à mesurer en termes de valeur. Cette société est puissamment orientée vers l’idéologie de la propriété privée, largement dominante, comme le sait Piketty.

Pour conclure, alors que ce système subit une très sérieuse crise économique et morale, il n’en continue pas moins son extension. Cette extension s’accompagne d’un développement accéléré, à la fois de production matérielle et de production non matérielle. Il est vraisemblable que ce type de développement va dominer partout dans le monde[5].

De nouvelles classes moyennes.

Piketty observe la formation d’une classe moyenne riche. Il dit que c’est une « innovation historique majeure ». (Piketty 2013,411)

« Que l’on ne s’y trompe pas : le développement d’une véritable classe ‘moyenne patrimoniale’ constitue la principale transformation structurelle de la répartition des richesses dans les pays développés au 20ème siècle. » (2013,410)

« …à la Belle époque…il n’existait pas de classe moyenne dans le sens précis où les 40% du milieu étaient quasiment aussi pauvres en patrimoine que les 50% les plus pauvres.» Aujourd’hui ces catégories sociales détiennent 1/3 du total des biens en Europe et un quart aux USA (2013,411) « Voilà un changement très substantiel à l’échelle de l’histoire, qui a profondément modifié le paysage social et la structure politique de la société et qui a contribué à redéfinir les termes du conflit distributif. » (Piketty 2013,412).

La structure contemporaine des inégalités telle que dépeintes par Piketty est la suivante : Comme auparavant, le capital en est encore le facteur dominant à l’arrière -plan, mais quelques changements émergent. Comme déjà remarqué dans la première partie du livre, le capital depuis 1700 a profondément évolué, de son état initial foncier à un état immobilier, industriel, financier. Mais Piketty remarque d’autres évolutions d’importance ; l’une d’entre elles serait l’apparition d’une nouvelle classe moyenne.

Il me semble (JCD) clair que ce dernier point est l’une des principales problématiques que tous ceux qui se sentent concernés par le Marxisme devraient prendre en compte. Pour Marx, les classes moyennes étaient un certain nombre de classes hybrides, les petits producteurs y étant à la fois travailleurs et capitalistes. Ces classes étaient nombreuses dans les sociétés capitalistes mais non caractéristiques du mode de production capitaliste. Marx, de façon correcte prédît que leur nombre se réduirait.

Les classes moyennes modernes sont de nature différente. Ces classes moyennes sont liées au développement et aux transformations du capitalisme. Piketty a raison de souligner leur importance. Mais il établit leur identification par l’intermédiaire du capital, qui peut être un capital immobilier. Cela ne convient pas comme cela sera discuté dans la dernière partie de l’article.

Quelques points critiques

Je suis désolé de dire que je ne considère pas le livre de Piketty comme un éclair dans le ciel noir des sciences économiques. C’est un livre intéressant mais il s’y trouve ce que j’estime être de vraies faiblesses. Je vais souligner 3 d’entre elles.

Définition du Capital

La première de ces faiblesses porte sur la définition du Capital. Il est clair que le capital, tel que le mesure Piketty est en cohérence avec la méthode habituelle des comptes nationaux. Mais à ce niveau, un comptable mesure des variables macro-économiques sans beaucoup réfléchir à leur signification. Or Piketty fait œuvre d’économiste professionnel et non de comptable de comptabilité nationale. Pourtant, sa recherche de résultats statistiques ‘avale’ sa compréhension des concepts, affaiblit sa capacité critique. Cela pour dire que chez lui, le concept d’inégalité exclut toute référence au capitalisme. Le paradoxe est que cet économiste utilise des statistiques de long terme, mais ignore l’histoire. C’est intéressant d’observer un chercheur, dont le mérite réside en ce qu’il établit son raisonnement et ses conclusions sur des séries statistiques de longues durées mais qui utilise ces séries comme si elles étaient, en elles-mêmes des preuves suffisantes. Nous pouvons observer le même phénomène avec la TV ; les images télévisuelles ne sont pas, par elles-mêmes la vérité mais elles sont, souvent, décrites et interprétées comme-telles. Les séries statistiques longues sont importantes et apportent de l’information mais elles ne préservent pas des dangers de l’idéologie et de l’interprétation erronée. L’exemple de Milton Friedman fait preuve de ce que je souligne ici.

Un des résultats de cet aveuglement particulier est la conceptualisation du capital par Piketty. Il écrit que le capital est un ensemble de ressources qui potentiellement sont échangeables sur le marché. Dire cela est un lieu commun. En réalité Piketty n’est pas intéressé par le Capital. Il est intéressé par « l’enrichissement général ». Cela est clair, page 85, quand il justifie l’inclusion de l’immobilier de résidence dans le capital.

Cette façon de penser, l’amène à faire la somme de valeurs liées à différentes catégories d’activités. Pour parler vite, certaines valeurs sont utilisées pour être accumulées, d’autres ne sont utilisées que pour l’échange immédiat avec une autre valeur d’usage ou pour la consommation finale. Ces formes de valeur, qui peuvent être toutes évaluées sur le marché forment-elles un groupe homogènes ? Je ne le crois pas, parce que je ne confonds pas le capital des capitalistes avec ce que je propose d’appeler « l’enrichissement général ». Nous ne pouvons pas, en conséquence, additionner ces quantités si ce n’est à certaines conditions et pour certaines analyses. Les mélanger n’aide certainement pas à comprendre le fonctionnement du système capitaliste dans son ensemble. Pour Marx et pour toute approche scientifique de l’économie capitaliste, le capital en tant que quantité (et de la façon la plus abstraite) est de la valeur utilisée pour accumuler, par extraction de valeur en provenance des travailleurs.

Mais l’immobilier, par exemple, que Piketty comptabilise comme capital, peut incarner au moins 5 sortes de relations sociales. Cela peut être un objet de profit (les compagnies d’assurance) ou un objet de spéculation (acheter pour revendre avec bonus). Et dans ce cas l’immobilier fonctionne comme capital. Mais il peut être aussi un investissement personnel (pour garder la valeur monétaire de l’épargne), une consommation finale (cas général), une consommation transférable (acheter un bien pour laisser en héritage). Se pose donc la question suivante : le problème statistique que soulève l’immobilier peut-il être passé sous silence, juste parce qu’il est difficile à traiter ?

La structure capitaliste de l’inégalité

Piketty étudie les inégalités ; mais il étudie ce phénomène comme s’il s’agissait d’un phénomène général, extérieur à l’histoire. Il ne perçoit pas que le capitalisme repose sur une variété spécifique d’inégalités que j’appelle « l’inégalité capitaliste ». Elle est différente par exemple, de l’inégalité esclavagiste ou de l’inégalité féodale ou de l’inégalité socialiste et ainsi de suite. Le système capitaliste produit des marchandises capitalistes et non juste des marchandises en général ; c’est pour cela que je dis que Piketty n’a pas le sens de l’histoire. Voici comment nous pouvons décrire l’inégalité capitaliste de base.

a) Elle s’enracine dans l’activité économique. En théorie, dans une société capitaliste, nous sommes tous égaux en droit. Dans le grand mouvement de rationalisation des sociétés évoqué par Max Weber, la bourgeoisie poursuivit jusqu’au bout la séparation de l’autorité religieuse d’avec le pouvoir politique ; puis elle introduisit une nouvelle séparation entre l’économique et le politique. L’inégalité capitaliste s’enracine dans l’économie, champ de l’activité sociale qui, aux dires de la bourgeoisie, ne concerne pas la politique.

b) C’est l’inégalité des moyens de production, de distribution, du financement de l’accès à la propriété et aux ressources. L’inégalité en propriété immobilière par exemple peut être très marquée, mais elle n’est pas décisive. Comme déjà mentionné un certain nombre de prolétaires ou de salariés modérément riches, peuvent avoir des biens immobiliers, mais ils n’ont pas de capital.

c) C’est l’inégalité dans la consommation de biens et services individuels que les salaires permettent (ou pas). Cette consommation est souvent couplée à un accès inégalitaire à la consommation collective des individus. Le sabotage de l’Etat Providence, par la bourgeoisie ne peut qu’exacerber les inégalités inhérentes au système.

d) C’est enfin une inégalité politique et culturelle. Dans une société capitaliste une personne qui ne possède rien, est une personne « qui n’a pas son mot à dire », à moins qu’elle ne rejoigne une organisation de lutte des classes. Ces personnes sont exclues de la société pour la seule « raison » de leur manque d’argent.

Sur cette base structurelle inégalitaire sont construites et reproduites des inégalités de diverses sortes qui se combinent aux inégalités naturelles. Il nous faut changer cette base structurelle pour éliminer les inégalités aujourd’hui avérées d’une société capitaliste.

Le rapport K/Y chez Piketty : Trois significations à la fois différentes et non cohérentes.

Piketty montre constamment son intérêt pour le rapport K/Y (capital national/revenu national). Ce rapport joue un rôle majeur dans son livre. Il écrit « la nouveauté du travail proposé ici, est qu’il s’agit, à ma connaissance, de la première tentative pour replacer dans un contexte historique plus large, la question du partage capital-travail et de la hausse récente de la part du capital en mettant l’accent sur l’évolution du rapport capital/revenu depuis le 18ème jusqu’au début du 21ème siècle. »(2013,349)

Je trouve cette intention très intéressante. Mais ce concept K/Y n’a pas de sens précis dans son livre. De fait on y trouve au moins trois significations différentes.

a) K/Y est d’abord un outil statistique. C’est une aide à la mesure. Il écrit : «pour le XVIIIème et le XIXème siècles, les estimations de la valeur du stock de capital sont probablement plus précises que celles portant sur les flux de revenus du travail et de revenus du capital. Dans une large mesure il en va de même aujourd’hui. C’est pourquoi nous avons choisi dans le cadre de notre enquête, de mettre l’accent sur l’évolution du rapport capital/revenu et non sur le partage capital/travail comme cela a été fait plus classiquement dans la recherche économique. » (Piketty 2013,77)

b) K/Y est aussi une variable indirecte qui lui sert dans l’observation de la transformation des économies post industrielles. Il écrit par exemple que « pour comprendre ces transformations (celles des biens de capitalisation fréquemment observées dans les économies post industrielles)…l’approche la plus féconde consiste à analyser l’évolution du rapport entre le stock total de capital et le flux annuel de revenu » (Piketty 2013,77). Dans ces citations de Piketty, le rapport K/Y ne parait pas être le concept économique au centre de son investigation. Les variables qui l’intéressent vraiment sont s le taux d’épargne et g le taux de croissance. Et dans ce cas K/Y joue un rôle explicatif dérivé.

c) K/Y, concept de la technologie. Piketty écrit (2013,340) « trop de capital tue le capital. Quelles que soient les institutions et les règles qui régissent le partage entre le capital et le revenu du travail, il est normal de s’attendre à ce que le produit marginal du capital décline avec l’augmentation du stock de capital ». Cette remarque fait partie du savoir des économistes et Piketty s’y réfère. Mais ce faisant il change une fois encore son interprétation du rapport K/Y. Il parle alors de technologie.

Comment rester informé sur les rythmes respectifs de changement de ces variables ? Selon Piketty (2013,342) ces différentes vitesses de changement dépendent «de la diversité des techniques disponibles ». Bien sûr, la distribution ces dernières décennies a été influencée par ce que Piketty (2013,77) appelle « un régime politique objectivement favorable aux capitaux privés ». Il mentionne aussi (2013, 273,274) « deux autres facteurs qui en ont substantiellement renforcé les effets au cours des dernières décennies…. D’une part un mouvement de privatisation et de transfert graduel de la richesse publique vers la richesse privée depuis les années 1970-1980, et d’autre part un phénomène de rattrapage de long terme des prix des actifs immobiliers et boursiers qui s’est également accéléré dans les années 1980-1990. »

A long terme, ce sont les caprices de la technologie (2013,370) qui déterminent la répartition de revenu entre le capital et le travail.

Ma (JCD) conclusion sur ce point est que sa conception de K/Y est confuse, ce qui le conduit à interpréter K/Y sans cohérence[6].

Conclusion

Les comptes rendus du livre de Piketty ont utilisé deux points de vue, l’un politique et l’autre théorique. Du point de vue politique, ce livre a été durement attaqué par les tenants des économistes de la classe dirigeante. Cela induit-il qu’il faille lui adresser louanges et chaudes félicitations, parce que les très riches seraient « shockés » d’être décrits comme ils le sont dans ce livre ? Ce n’est pas mon avis. C’est pourquoi j’ai choisi le point de vue théorique et me suis efforcé de me situer sur ce plan. Je pense que, malgré des points intéressants, le livre de Piketty n’est pas à la hauteur de la publicité dont il fait aujourd’hui l’objet. Je pense également qu’il est significatif d’une intuition de type politique : comment donner un débouché nouveau à la social-démocratie dans un système capitaliste mondialisé de plus en plus inégalitaire ? Picketty se donne alors de réaliser un très, très vaste programme, au point que l’on peut se demander si celui de « Mort aux cons » ne serait pas finalement plus facile à mener à terme.

Notes

Voir : « http://en.wikipedia.org/wiki/Thomas_piketty »

Voir :« http://www;lemonde.fr/idees/article/2012/04/17/nous-economistes-soutenons-hollande_1686249_3232.htlm. »

Chen P., 2014, « Disillusion in Utopian Capitalism and Lessons to the Development of China», Review of Capital in the twenty first century by T. Piketty. World Review of Political Economy 5 (3) : 414-29.

Hobson J.-A, 1902, Imperialism : a Study, Cosimo, New York, (réédité en 2005).

Houben H., 2014, « Le Capital du 18ème au 21ème Siècle », Etudes marxistes, n° 107 (29-51).

Lenin V. 1917, L’Impérialisme, Stade Suprême du Capitalisme, Editions en Langues Etrangères, Moscou.

Piketty T., 2013, Le Capital au 21ème siècle, Edition du Seuil, Paris.

 

[1]Cet article est paru dans International Critical Thought (Beijing), Routledge. Sa traduction (validée par l’auteur) a été effectuée par P. Lanta-Ménahem, PCF, section de Pau FD 64.

 

[2] Hi hi hi hi (JCD).

[3] Il n’y a pas de « super-impérialisme », c’est-à-dire d’organisation supérieure et bureaucratique des intérêts collectifs « bien compris" du capitalisme. Le capital dépasse son cadre national originel, se mondialise, mais a besoin du cadre national pour son fonctionnement global, pour la détermination des rapports de forces au plan mondial. Il ressort cependant du livre de Picketty une « définition de la nation » correspondant aux modalités actuelles du fonctionnement de l’impérialisme, définition que je trouve intéressante en cela qu’elle résume l’appauvrissement et la dénaturation de ce que les peuples ont compris et intégré dans leurs pensées comme expression de la « réalité nationale ». En effet, une nation ne serait plus, désormais, que la somme, calculée en permanence, des capitaux entrants et des capitaux sortants. Les groupes monopolistes mondiaux auraient besoin de leur Etat (et non plus de leur nation) pour s’affronter au plan mondial. Mais pour que cet Etat soit maintenu sous perfusion avec un semblant de vie et de la couleur aux joues, encore faudrait-il que se réalise, sur son territoire d’autorité, un certain équilibre quantitatif entre capitaux entrants et sortants. On est vraiment très éloigné de la définition que Renan donna d’une nation, dans son célèbre discours de 1882.

[4] Ce sont « les grands absents », au sens statistique du terme (note de JCD).

[5] Autrement dit, on observerait simultanément la crise du système capitaliste et l’expansion des modalités de son fonctionnement. Les Etats-Unis, par exemple, perdraient progressivement de leur puissance mais le modèle de vie américain s’étendrait (note de JCD).

[6] K/Y peut être considéré, dans le cadre de la théorie de Marx, comme l’expression de ce que cet auteur appelait « la composition organique du Capital, ou rapport organique du travail passé et du travail vivant. Pour étudier la dynamique des sociétés, Marx produisait ainsi un concept, celui de la mesure et du rapport entre le travail passé accumulé et le travail vivant dépensé au cours d’un intervalle donné de temps. La forme générale du concept de composition organique du capital serait celle de « composition organique du travail », laquelle, dans une société capitaliste, fonctionnerait comme composition organique du capital (note de JCD).

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