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Réveil Communiste

Opprimer sans tuer : la douceur de la bourgeoisie (Dépassser la démocratie bourgeoise, 9/12)

30 Octobre 2023 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #Théorie immédiate, #GQ, #Répression, #A gerber !, #Qu'est-ce que la "gauche"

Ciudad Juarez, aux portes du paradis de la démocratie de marché.

Ciudad Juarez, aux portes du paradis de la démocratie de marché.


Article précédent : Socialisme et négatif, suite, 8/12

 

      9 : Opprimer sans tuer : douceur de la bourgeoisie

D

Nous vivons depuis 1989 dans les métropoles du capitalisme dans un « meilleur des mondes » (où Huxley s’avère avoir été un meilleur prophète qu’Orwell) où la douce gouvernance des experts et des humanistes diplômés en sciences politique exerce avec doigté un pouvoir « soft », et fomente dans le reste du monde ces coups d’États prétendus non-violents que sont les « révolutions colorées », et à domicile des voies de fait parlementaires ou judiciaires, comme le vote du traité de Lisbonne malgré le « non » majoritaire au referendum sur le TCE en 2005, ou l’interdiction des médias russes dans les pays de l’UE, sans base légale. En attendant qu’ils montrent à nouveau de quoi ils sont capables (comme entre 1914 et 1945) à la prochaine crise globale les pouvoirs en tant que tels font de moins en moins d’abus caractérisés, et tuent de moins en moins de gens, même dans la « périphérie » colonisée où Aimé Césaire faisait savoir qu’à l’époque d’Hitler, c’était le régime hitlérien pour tout le monde, même pour les sujet des démocraties.

Aujourd’hui les États sont doux, édulcorent leur langage,  répudient le racisme, prônent l’égalité des genres, présentent leurs excuses et témoignent de leurs repentirs à tout bout de champ même quand on ne leur a rien demandé, développent les armes non létales, et fourniront le cas échéant de l’aide psychologique à leur victimes.

Dans cette ambiance ouatée la protestation anti-sécuritaire des gauchistes de tous poils s’épuise dans son expression, car elle prouve en quelque sorte dans l’instant son inanité : si c’était vrai qu’une tyrannie orwellienne se mettait en place, il serait interdit de le dénoncer, et le moins qu’on puisse dire c’est que ceux qui critiquent le Léviathan n’ont pas l’air de souffrir beaucoup de leur protestation. Et lorsque cela se produit vraiment dans une lointaine contrée comme l’Ukraine depuis 2014 on ferme bravement les deux yeux pour que le rêve continue.

 Il est vrai qu’il faut protester contre les petits abus de l’État pour en éviter de plus grands contre lesquels il serait peut-être impossible de protester plus tard. Mais on dit ça depuis un demi-siècle durant lequel la puissance des États et leurs prérogatives n’ont cessé de s’amoindrir et en attendant le jour fatal de la tyrannie totalitaire et cybernétique qui n’arrive jamais, cette protestation nécessaire à l’hygiène du capitalisme renforce son spectacle démocratique en faisant croire en la bénignité de ce meilleur des mondes. Sans compter qu’elle alimente les théories du complot qui tendent à discréditer les contestataires radicaux de la démocratie de marché. C’est pour cela qu’on ne me  verra pas militer, par exemple, ni contre la vidéo surveillance ni contre les vaccins, ni pour rouvrir l’enquête sur le 11 septembre, à propos de laquelle je pense que les fascistes que les impérialistes ont couvé dans le monde musulman pour combattre le communisme se sont tout simplement retournés contre eux. Ce genre d’accident meurtrier mais sans importance à l’échelle historique se produit tout le temps ! Cela dit, si quelqu’un veut le faire, libre à lui, l’anti-complotisme n’étant qu’un truc pour discréditer d’avance toute critique du capitalisme qui pourrait surgir à l’avenir, vraie ou fausse.

La brutalité la plus crue et la violence de classe sont toujours présentes dans ce monde. Mais, sauf dans les périphéries (le mot « Ukraine » signifie précisément cela, en langue russe!), et au voisinage des puits de pétrole, la violence n’est plus violence d’État, ou bien moins qu’avant, c’est maintenant un produit du chaos, de l’anomie, des mafias, de mercenaires et de paramilitaires, de criminels de droit commun, bref des suppôts de base et des enthousiastes du capitalisme comme système de pensée et comme mode de vie. La violence, monopole d’État, comme le reste, a été privatisée. Ainsi ce n’était plus nécessaire que ce soient des nervis organisés et payés par le patronat et bénéficiant de l’appui de la police, comme les bandes fascistes de l’Italie des années 20, qui s’attaquent aux jeunes manifestants français en 2005 et en 2006, ce n’étaient que des jeunes prolos ordinaires pourtant bien scolarisés, aveuglés par la consommation marchande, spontanément prêts à « bolosser » c’est-à-dire à lyncher, les « intellos », les grévistes et les militants. Les provocations du pouvoir ont germé sur un terrain propice qu’il avait soigneusement travaillé. Mais c’est un fait : l’élection du regrettable président français qui détruisit la Libye et déstabilisa l’Afrique, il faut en remercier les émeutiers de novembre 2005 qui en détruisant quelques milliers de voitures firent croire au monde entier que le pays était à feu et à sang. Qu’on ne dise pas qu’il s’agissait d’une révolte sociale ! Ils savaient très bien ce qu’ils faisaient en brûlant des écoles ou des autobus, et les gauchistes qui tentaient de les récupérer les croyaient plus bêtes qu’ils n’étaient.

Dans la périphérie les démocraties de marché reposent sur un usage plus direct et plus grave de la violence, les gouvernements libéraux d’Amérique latine reposent sur des fosses communes où les victimes des escadrons de la mort des paramilitaires, des militaires et des trafiquants de drogue sont confondues.

Bref, la violence a été rejetée du politique et s’est logée dans le droit commun. Mais c’est une violence politique quand même. Le refoulement de la violence de l’espace public au domaine du vécu privé est un fait : et la dictature de la bourgeoisie américaine se lit dans les chiffres affolants d’incarcération. Il n’empêche que, sauf exception, comme celle des Black Panthers qui sont encore en prison des dizaines d’années après leur condamnation, les enfermés prolétaires américains ont réellement été condamnés pour des délits réels, non politiques, commis dans l’immense majorité des cas au détriment d’autres prolétaires.

Il faut que ce cercle infernal soit rompu, et je ne parierais pas que cela se fera sans violence non plus. Fidel et le Che ont su mettre fin à la tyrannie du président-gangster Batista à Cuba en 1959. Deux ou trois milliards de prolétaires dans le monde attendent toujours que des communistes déterminés apparaissent à nouveau et viennent faire le ménage, aux portes du paradis de la démocratie libérale à Juarez et à Tijuana,. à Tanger ou à Tripoli.

Article suivant : Les buts de la dissidence anti-socialiste (10/12)

 GQ,20 juin 2023

 

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