Le PC portugais vu par le PTB
28 Décembre 2012 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #L'Internationale
sur le blog du PTB :
« Pendant trois jours, le cœur du Portugal se trouvera ici sur la rive gauche du Tage », a déclaré, souriante, Maria Neto de Sousa. La maire de la ville d’Almada a ainsi ouvert le 19e Congrès du Parti communiste portugais (PCP), le 30 novembre. Une délégation du PTB y était.
Le Congrès du PCP a été préparé par 1257 réunions. Plus de 1200 délégués y ont porté la voix des 60 000 membres du parti. L’essentiel des discussions a porté sur la transition vers le socialisme, avec un programme dit de « démocratie avancée ». (Photo PCP)
Nous sommes au sud de Lisbonne, de l’autre côté du Tage, sur la route de la ville industrielle de Setubal. Ici, à Almada, une agglomération de 170 000 habitants, longtemps berceau des chantiers navals portugais, les communistes ont la majorité sans interruption depuis la révolution de 1974, qui a renversé la dictature de Salazar et Caetano.
C’est dans le hall multisports de la ville que le 19e Congrès du PCP s’est tenu du 30 novembre au 2 décembre. Il terminait un processus entamé dix mois plus tôt : 1257 réunions ont préparé les travaux d’un Congrès portant sur le socialisme, la démocratie et l’actualité des luttes.
Plus de 1200 délégués représentant les 60 000 membres du parti portaient un message déterminé et chaleureux : « Nous avons un rêve d’une autre société, et ce rêve a un parti : le PCP », a déclaré ému un jeune congressiste.
Chaque intervention à la tribune — où le responsable de la fraction parlementaire du PCP à la Chambre reçoit le même temps de parole que le délégué des dockers ou celui de la section sport — donne un contour concret et précis du Portugal d’aujourd’hui. Mais aussi de sa résistance.
Que veut dire vivre dans un pays — pas plus peuplé que la Belgique — où le chômage touche 1,4 million de personnes, où près de 3 millions de pauvres et de pensionnés doivent vivre avec 300 à 400 euros par mois ?
Que signifie vivre avec la succession de plans d’austérité et une récession sans fin, assumés d’abord par le PS de José Sócrates (jusqu’en 2011) puis la coalition de droite du PSD-CDS, dirigée par Pedro Passos Coelho, détestée par la population après un an et demi de mandat ? Quelle est la réalité du « Pacte d’agression », fait d’austérité et de privatisations signé entre partis de droite et PS avec la troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et FMI), en 2011 ? Que représente le fait de vivre dans un pays où chaque journée amène de nouvelles attaques : dockers engagés à la journée, minerval pour l’école secondaire, journalistes menacés, eau privatisée, droits syndicaux sous les feux, etc. ?
Le Congrès est au carrefour des résistances à ce pacte d’agression. « Le capital n’a jamais eu peur de la lutte non-organisée. Ce qu’il craint, c’est la lutte organisée », souligne Jeronimo de Sousa, le secrétaire général du PCP.
Ici, les militants communistes racontent comment ils ont préparé, mobilisé et aidé à faire réussir quatre grève générales et quatre manifestations nationales géantes depuis 2010, en collaboration avec le plus grand syndicat portugais (CGTP). Ici, on ne cache pas les difficultés qu’on a eues à vaincre le fatalisme. Un délégué d’une entreprise explique ainsi le travail de la section locale pour surmonter le découragement après que peu de travailleurs aient suivi une grève générale en 2011. Il raconte ensuite comment, à travers un travail d’information et de conviction, la grève générale du 14 novembre a été suivie par quasiment toute son entreprise.
Tout étant crédité de 10 % dans les sondages pour les élections, le PCP est convaincu que c’est d’abord d’un large mouvement populaire que viendra la possibilité de contrer ce pacte d’agression.
Des artistes aux travailleurs de la santé, en passant par les métallos, les ouvriers agricoles de l’Alentejo, les viticulteurs de l’Algarve, les étudiants, les mouvements de pensionnés, et même les petits entrepreneurs : dans toutes ces couches, les délégués du Congrès expliquent comme ils construisent un large front pour une alternative politique « de gauche et patriotique » : « Pour finir avec la soumission et la dépendance, pour rendre les richesses au pays, pour rendre les droits sociaux et les salaires aux travailleurs. »
Mais cette alternative ne peut se faire sans ruptures : rupture avec le pacte d’agression, avec l’alternance sans alternative (PS et droite se succédant au pouvoir depuis 36 ans), avec les politiques de droite, avec l’intégration européenne. En effet, l’Union européenne est dénoncée comme un « instrument politique de la domination du grand capital ». Pour le PCP, « cette Europe n’est pas réformable » et une autre Europe des peuples ne peut donc passer que « par la mise en échec du processus d’intégration européenne».
Cependant, cette alternative « de gauche et patriotique » n’est qu’un jalon dans le combat vers une autre société que défend le PCP : le socialisme. C’est précisément sur la transition vers le socialisme, avec un programme dit de « démocratie avancée » (sur les terrains politique, économique, social, culturel et national), qu’a porté l’essentiel des débats, laissant encore beaucoup de pistes ouvertes.
Jéronimo De Sousa, secrétaire général du PCP, parle du passé, du présent et du futur du socialisme : « Nous n’éludons pas les retards, erreurs et déformations contraires à la légalité socialiste et à l’idéal communiste qui ont eu lieu, mais nous mettons en avant les acquis et réalisations obtenus avec le projet de construction du socialisme, en URSS et dans d’autres pays, et qui constituent des avancées cruciales. (...) Nous analysons également les conséquences des défaites du socialisme, à 20 ans de distance, non seulement dans les pays où il était construit, mais à l’échelle globale, où le capitalisme, libéré de son contre-poids, révèle sa vraie nature, son caractère prédateur, ne portant que l’exploitation, le recul social et civilisationnel ainsi que la guerre. (...) Nous pensons qu’il y a clairement un mouvement de relance, dans l’imaginaire collectif, dans lequel le socialisme est à nouveau une référence pour des millions d’êtres humains. »
(Interview à l’Avante, hebdomadaire du PCP, à l’occasion du 19e congrès)
Naissance : 1921
Secrétaire général : Jéronimo De Sousa
Nombre de membres : 60 484 membres. 5800 nouveaux membres depuis 2008.
Hebdomadaire : Avante (qui organisé chaque année une fête attirant 300 000 personnes)
Site Internet : www.pcp.pt (où vous pouvez trouver les documents du Congrès)
Élections : 8 % aux élections de 2011, avec 16 députés pour la CDU (coalition électorale unitaire composée du PCP, du parti écologiste portugais et d’Initiative démocratique)
Réveil Communiste :
Réveil Communiste est animé depuis 2010 par Gilles Questiaux (GQ), né en 1958 à Neuilly sur Seine, professeur d'histoire de l'enseignement secondaire en Seine Saint-Denis de 1990 à 2020, membre du PCF et du SNES. Les opinions exprimées dans le blog n'engagent pas ces deux organisations.
Le blog reproduit des documents pertinents, cela ne signifie pas forcément une approbation de leur contenu.
Le blog est communiste, non-repenti, et orthodoxe (comme ils disent). Il défend l'honneur du mouvement ouvrier et communiste issu de la Révolution d'Octobre, historiquement lié à l'URSS quand elle était gouvernée par Lénine et par Staline, mais sans fétichisme ni sectarisme. Sa ligne politique est de travailler à la création et à l'unité du parti du prolétariat moderne, et de lutter contre l'impérialisme (contre le seul qui importe, l'impérialisme occidental, dirigé par les États-Unis).
Les textes originaux, écrits par l'animateur seul ou en collaboration et dont il endosse pleine et entière responsabilité sont publiés dans la catégorie GQ, accessible directement dans la barre de menu. Ils sont reproductibles, sans modification, à condition d'en mentionner l'origine.
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