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Réveil Communiste

Les massacres du 7 octobre et leurs conséquences

6 Octobre 2024 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #GQ, #Impérialisme, #Front historique, #Positions, #Asie occidentale

Les massacres du 7 octobre et leurs conséquences

Copie d'un texte rédigé à chaud, mis à jour le 5 octobre 2024, qui semble rencontrer quelques difficultés de diffusion aujourd'hui.

Les troupes du Hamas au cours de leur sortie surprise de Gaza ont perpétré au moins trois massacres de masse dans le Sud du territoire israélien, le 7 octobre 2023 - qui ont tué de manière indiscriminée plus d'un millier de civils et de militaires, et ont capturé plus de 200 otages dont beaucoup ont été tué depuis.

Les victimes annoncées sont les habitants de deux kibboutz, les participants à une « rave party » à proximité de la frontière de Gaza et des familles de militaires israéliens. Certains semblent aussi avoir été victime de "tirs amis" indiscriminés causés par la réaction de panique de l'armée face à l'incursion.

Depuis, la propagande israélienne a fait circuler parmi les "décideurs" du monde entier (politiciens, journalistes, influenceurs, etc.) un film monté avec des "morceaux choisis" particulièrement atroces dans le but de justifier les massacres sans précédents de Palestiniens, tout aussi indiscriminés en cours en représailles - dont le nombre des victimes directes approche au bout d'un an les 55 000 tués et disparus, et le bilan total pourrait dépasser 300 000 morts.

Rappelons aux porte-paroles sionistes des médias, qui ont le verbe haut et l'amalgame facile que reprocher à quelqu'un qui condamne un massacre en cours de ne pas avoir condamné un autre massacre est une manière de soutenir ce massacre en cours.

En supposant que les faits soient correctement établis, ce qui semble être le cas en partie, pourquoi une armée – le Hamas en est une, quoi qu’on pense de lui , c’est pour l'essentiel celle des deux millions d’habitants enfermés et bombardés à Gaza depuis 20 ans - commettra-t-elles des massacres de civils, en dehors des crimes liés aux stratégies de contre-insurrection – que pratiquent toutes les armées régulières dans leurs « guerres asymétriques » sous un vernis de communication?

Dans notre monde seuls les événements atroces et les individus pervers suscitent l’intérêt et méritent la publicité et semblent faire de l’effet sur un public complètement anesthésié. Il y a donc dans les actions avérées d'une partie des combattants du Hamas, aussi bizarre que ça puisse paraître, une volonté de propagande et une recherche de prestige.

Mais le motif le plus évident et le plus fréquent de ces crimes de masse est de réunir à long terme les conditions d'une « épuration ethnique ». En procédant ainsi, en tuant plus d'un millier de civils israéliens, et en publicisant les images de ce massacre (dans le style dégoûtant de la culture postmoderne), on envoie un message clair : les juifs doivent partir de Palestine s’ils veulent sauver leur vie.

C’est l’écho lointain des massacres de Palestiniens perpétrés par l'Irgoun et par d’autres groupes armés juifs qui se fondirent ensuite dans l’armée et l’État sionistes, pendant la guerre d’indépendance israélienne, en 1948 et 1949, qui ont provoqué la « Nakba », l’exode général de la population palestinienne du territoire du nouvel État vers les camps de réfugiés de la périphérie comme ceux de Gaza.

L’épuration ethnique qui consiste à vider un territoire de sa population présente pour en implanter une autre, en général au nom de droits historiques plus ou moins établis et dans tous les cas abusifs a été une pratique courante au XXème siècle et la manière habituelle de faire passer la pilule auprès des masses de spectateurs abrutis par les médias consiste à englober les victimes dans une culpabilité collective inexpiable, et à persuader ceux qui commettent les tortures et les massacres et qui terrorisent les populations pour les faire fuir qu’ils ont affaire à des ennemis implacables et sans principes, des « animaux » comme disent maintenant les officiels israéliens en désignant les Palestiniens, qui ne méritent aucune pitié et qui feront pire à la première occasion. Un massacre est donc dénoncé afin d'en justifier un autre.

Toute épuration ethnique peut en effet sous l'escalade de la haine mutuelle instrumentalisée par les factions extrêmes se transformer en génocide, comme on a vu faire au Rwanda, et en Arménie.

Le calcul cynique du Hamas a donné des ailes aux partisans israéliens d’une seconde expulsion des Palestiniens de tous les territoires contrôlés par Israël, de Gaza et de Cisjordanie, à l’extrême-droite raciste assumée qui est parvenue au pouvoir en Israël avec Netanyahou. Une telle opération comporterait des risques incalculables pour la paix mondiale, et se retournerait contre ses auteurs, et contre l’ensemble du peuple juif. Il semble pourtant que c'est bien cela le plan qui est mis en application avec les bombardements aveugles et le blocus impitoyable de Gaza (eau, gaz, électricité, vivres, médicaments), les attaques contre les hôpitaux, les médias, les agences de l'ONU et les ordres d'évacuation de masse.

Toutes considérations morales mises à part, Il faudrait que les défenseurs inconditionnels d’Israël cessent de s'intoxiquer de leur propre récit de propagande et se rendent compte que l’expulsion de tous les juifs de Palestine est envisagée avec indifférence – ou pire - par sept des huit milliards d’habitants de ce monde.  Les Non-Occidentaux pensent pour la plupart qu’Israël n’est qu’une colonie de l’Occident, que les juifs qui en proviennent peuvent y retourner, comme les pieds-noirs algériens sont retournés en France, et qu’ils doivent restituer le territoire à ses occupants légitimes, les Palestiniens qui en ont été chassés pour la plus grande partie en 1948, et qui subissent l'occupation ou le blocus militaire pour le reste, Gaza et la Cisjordanie,  depuis 1967... Exactement comme en 1948 à la fondation de l'État israélien Golda Meir et les autres politiciens sionistes pensaient qu’il y avait bien assez de place pour les Palestiniens dans le reste du monde arabe - et ils le pensent toujours. Palestiniens qui d’ailleurs selon eux n’existaient même pas.

La logique de la confrontation ne peut amener les Israéliens qu’à gagner des batailles encore en encore, toujours plus coûteuses, pour finalement perdre la guerre, sauf à imaginer une confrontation nucléaire ; et même dans ce cas.

Le calcul politique sioniste qui a consisté à favoriser la montée du Hamas aux dépens de l’OLP, avec la complicité des pétromonarchies du Golfe, pour avoir en face de soi les adversaires les plus faciles à combattre militairement et politiquement se retourne en définitive contre le peuple juif. La seule chance de maintien d’une population juive au Proche-Orient, à long terme, était la création d’un État palestinien laïc judéo-arabe, celle qui est défendue par Rima Hassan, qui a suscité la haine hystérique qu'on sait. La solution à deux États pouvait être une étape dans cette direction, sachant qu’ils ne sont pas viables stratégiquement et qu'il n’y a jamais eu la place sur le territoire de l'ancien mandat palestinien pour deux États ennemis.

Mais le fait que les deux camps en présence soient maintenant contrôlés par des forces politico-religieuses aux caractéristiques fascistes a rendu cette solution presque impossible à envisager dans l’avenir prévisible.
Le risque d'une escalade internationale est évident et le pire est donc malheureusement probable.

La réaction israélienne aux massacres du 7 octobre n'a été rien d'autre qu'un massacre de représailles décuplées et une punition collective des Palestiniens, étendues aussi à la Cisjordanie dans la logique contre-insurrectionnelle des armées coloniales qui est de noyer toute rébellion dans le sang des civils, femmes, enfants, vieillards indistinctement et sans aucune stratégie politique à terme. Ce massacre outre qu'il ne sert à rien pour consolider la situation chancelante de l'État juif permet aussi au camp d'en face de faire l'économie d'une autocritique des moyens employés le 7 octobre.

De toute manière le nombre des victimes subies ou infligées ne change pas la justesse d'une cause contrairement à ce que tout le monde à l'air de croire et ceux qui se vengent d'un massacre par un autre loin d'avoir une excuse, sont doublement condamnables : non seulement ils tuent, mais ils le font avec une arrogante bonne conscience. A ceux qui demandent "que doit donc faire Israël face au terrorisme du Hamas" on peut répondre qu'il n'aurait peut-être pas dû pour commencer expulser les Palestiniens de leur propre pays. Le mal étant fait, il lui incombe maintenant de négocier une solution avec ceux qui se trouvent comme adversaires en face de lui - où de disparaître à moyen terme. Exterminer les cadres politiques et militaires du Hamas et du Hezbollah libanais, tuer les journalistes qui témoignent des crimes sur place, ensevelir Gaza  et maintenant Beyrouth sous les bombes est une démarche suicidaire, chaque bombe qui tombe ébranle et ruine l'État juif dans ses fondations.

En ce qui concerne l'accusation de génocide portée devant la justice internationale, les responsables israéliens pourront toujours ergoter sur le sens exact de ce terme, mais leurs arguments se résumeront à ceci : nous n'avons pour le moment tué que 1, ou 2, ou 10 % des habitants de la Bande de Gaza, les nazis ont tué 75 % des juifs d'Europe : vous voyez comme nous avons encore de la marge avant d'être comparables à eux !

GQ, 12 octobre 2023 - 5 octobre 2024

PS S’il avait été nécessaire de faire oublier de quelle manière plus de 200 manifestants non-violents palestiniens avaient été froidement assassinés par les militaires - et des civils - israéliens lors des Journées de la Terre sur la frontière de Gaza, en 2018, on n’aurait pas agi autrement. Mais ce n’était pas nécessaire, tout le monde semble les avoir oublié, y compris les défenseurs des Palestiniens.

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